3 octobre 1915 : le régiment est en alerte, nous quittons le bivouac des Hauts-Bâtis



Le dimanche 3 octobre 1915
Je suis de jour. Exercice le matin. Repos le soir. Le régiment est en alerte, on s’attend à partir d’un moment à l’autre. A 16 h, concert vocal et instrumental par la musique. Nous quittons le bivouac des Hauts-Bâtis ou la Croix-Gentin à 23 h. Temps très beau.

Dimanche 3 octobre 1915
Mon cher père,

J’avais commencé d’écrire à l’encre, mais comme je suis obligé d’écrire sur mon genou, c’est plus facile au crayon. – C’est aujourd’hui le huitième jour que je suis au même emplacement dans la forêt, tout le régiment est au même endroit et nous en couvrons bien plusieurs hectares. C’est pour ainsi dire du repos puisque nous n’avons que quelques heures de travail par jour et que nous avons toutes nos nuits pour dormir. Je dors bien 11 heures par nuit.

Peut-être que de grandes fatigues nous attendent, aussi nous en profitons en ce moment.

Je vous envoie encore dans cette lettre 4 cartes postales que j’ai reçues ces jours‑ci. Vous les mettrez avec les autres. Vous me ferez savoir si vous les avez reçues, ainsi que celles que je vous ai envoyées depuis ma permission.

Le temps est beau depuis trois jours avec forte gelée le matin.‑ Nous avons une source à 800 m de notre bivouac, où nous allons nous laver et chercher de l’eau pour boire.

Le canon tonne peu depuis deux jours.

Vous êtes peut-être en pleines vendanges en ce moment et devez être bien fatigué le soir. Heureusement que vous avez un bon lit. Avec votre douleur à la jambe vous ne seriez pas heureux à ma place pour coucher par terre et dehors. Moi, ça ne me fait rien et je dors quand même.

Vous tâcherez de ne pas laisser geler les plantes d’appartement que vous aviez mises en pots. Je n’ai pas besoin de vous dire d’entretenir le jardin. Je sais que vous le faites toujours bien. Si vous n’avez pas de fleurs à y mettre pour cet hiver ça n’a pas d’importance, le principal c’est qu’il soit propre.

Avez-vous enlevé le clou qui était à ma roue arrière de ma bicyclette ? Je vous l’avais dit dans une lettre.‑ J’ai envoyé une lettre à Aimée hier en lui demandant un colis.

Je ne vois plus rien à vous signaler pour le moment – Santé excellente.

Croyez à toute mon affection. ‑ Votre fils ‑ H. Moisy

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30 septembre 1915. Il neige.



30 septembre 1915.  Schmargult

Il neige.

Et les nouvelles arrivent toujours par mille sources, par les muletiers qui viennent de la gare du Hohneck, par le ravitailleur qui vient de Gérardmer, par le fil téléphonique qui vient du Collet. Elles sont fantaisistes, elles fabriquent de la victoire comme les usines fabriquent de la mélinite, elles décuplent le nombre des prisonniers, des canons enlevés et des kilomètres conquis, elles percent le front en dix points, brûlent Lens et tuent le Kaiser. Elles sont toujours officielles et viennent en droite ligne du quartier général –du Q.G.- de l’armée de Maud’huy. En réalité elles font la boule de neige par les sentiers qui vont de Gérardmer à Schmargult, elles partent grosses comme une noisette et nous parviennent vastes comme un ballon. Le coup d’épingle de notre scepticisme a vite fait de les réduire à la proportion d’un grain de mil. Mais tout de même, pendant quelques instants elles nous donnent du plaisir, nous y croyons comme les grands enfants croient aux contes de fées, nous y croyons parce qu’il nous plaît de croire que nous y croyons.

Aujourd’hui il s’agit de trois divisions françaises qui auraient percé le front, oui per-cé-le-front ! Où ? Quand ? Comment ? Nul ne le sait. Mais c’est officiel, archi-officiel, affiché en toutes lettres sur le mur de la mairie de Gérardmer, et transcrit par notre ravitailleur, homme de confiance.

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27 septembre – 2 octobre : repos puis bivouac d’alerte



Le lundi 27 septembre 1915
Repos toute la journée. La canonnade française continue en Champagne. On nous communique officiellement l’avance en Champagne et 23 000 prisonniers et 24 canons. La pluie tombe jour et nuit.

Le mardi 28 septembre 1915
Repos toute la journée. Canonnade violente à gauche. Fusillade la nuit à la Harazée. Pluie toute la nuit.
Le mercredi 29 septembre
Repos toute la journée. Temps toujours humide.
Le jeudi 30 septembre 1915
Exercice le matin. A 15 h, ordre de bivouac d’alerte, tous les hommes doivent être équipés, les couvertures sont ramassées et mises en paquets par demi-section, puis mises dans une voiture. A la nuit, aucun événement grave n’étant survenu, on redonne les couvertures. Temps couvert, humide et très froid.
CARTE POSTALE : Recto : des murs en ruine et un large escalier, des arbres en haut à droite.  » 573. La grande guerre 1914-15. – Les ruines de CLERMONT EN ARGONNE (Meuse) Sous aucun prétexte sauf celui de dissimuler leurs vols le pays fut détruit par les flammes »

Visé Paris 573 ‑ »Phot-express » ‑ Imp. Baudinière, Nanterre

Verso :: Monsieur Marc Moisy Ragot

à Bourgueil

Indre & Loire

 

Jeudi 30 septembre 15 – 15 heures

Mon cher père

Santé toujours très bonne .Toujours en forêt sous nos tentes. Temps humide.

Meilleurs baisers. Votre fils dévoué ‑ H. Moisy
Le vendredi 1er octobre 1915
Repos toute la journée. Jeux divers. Le capitaine de Langle de Cary arrive à la 5ème compagnie. Nous sommes toujours en bivouac, dans la forêt, sous nos tentes. La canonnade diminue d’intensité. Temps nuageux et humide.
Le samedi 2 octobre 1915
Exercice le matin. Repos l’après-midi. Peu de canonnade. Temps sec et froid. Gelée forte.
Carte lettre gommée – 4 drapeaux en noir – B. M. Paris

Samedi 2 octobre 1915

Ma chère Eugénie,

Je t’écris cette lettre par un temps magnifique, il y a eu ce matin une forte gelée et le temps est resté clair toute la journée. Il y a assez longtemps que nous n’avions que de la pluie.

Aujourd’hui nous n’entendons presque pas le canon.

Il y a exactement un an que j’ai quitté Orléans pour la deuxième fois, un an que je n’ai pas quitté l’Argonne, sauf pour ma permission ; avec un mois de campagne au début, ça me fait treize mois sur le front.

Depuis hier, nous avons comme commandant de la 5ème Cie le capitaine de Langle de Cary, fils du général commandant la 4ème armée. Je n’ai pas encore eu le temps de l’apprécier pour pouvoir en dire quelque chose.

Je suis en bonne santé. Auguste également.

Accepte une bonne pensée de ton frère qui t’aime. H. Moisy

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26 septembre 1915 : je ne recommencerai pas une journée pareille pour 500.000 francs



Le dimanche 26 septembre 1915
Nous arrivons au bivouac des Hauts-Bâtis à 3 h. Nous couchons sur la terre sous nos tentes. Repos toute la journée. Beaucoup d’hommes qui n’avaient pu suivre la compagnie ou qui s’étaient égarés dans les boyaux rentrent individuellement. Nettoyage des armes et des effets. Temps nuageux.

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24 septembre 1915 : l’attaque est prévue demain



Le vendredi 24 septembre 1915
Repos toute la journée. Le colonel a lu une proclamation du généralissime au sujet de l’attaque de demain. Nous laissons nos couvertures. L’attaque est décidée pour demain sur tout le front. Je pars à 16 h 30 pour reconnaître le boyau n° 3 à Saint-Thomas, dans lequel ma compagnie doit venir s’installer demain matin. J’arrive à Saint-Thomas à 19 h et j’attends ma compagnie auprès de la route où se trouve une batterie de 155. Le bombardement continue sans arrêt.

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