30 septembre 1915. Il neige.



30 septembre 1915.  Schmargult

Il neige.

Et les nouvelles arrivent toujours par mille sources, par les muletiers qui viennent de la gare du Hohneck, par le ravitailleur qui vient de Gérardmer, par le fil téléphonique qui vient du Collet. Elles sont fantaisistes, elles fabriquent de la victoire comme les usines fabriquent de la mélinite, elles décuplent le nombre des prisonniers, des canons enlevés et des kilomètres conquis, elles percent le front en dix points, brûlent Lens et tuent le Kaiser. Elles sont toujours officielles et viennent en droite ligne du quartier général –du Q.G.- de l’armée de Maud’huy. En réalité elles font la boule de neige par les sentiers qui vont de Gérardmer à Schmargult, elles partent grosses comme une noisette et nous parviennent vastes comme un ballon. Le coup d’épingle de notre scepticisme a vite fait de les réduire à la proportion d’un grain de mil. Mais tout de même, pendant quelques instants elles nous donnent du plaisir, nous y croyons comme les grands enfants croient aux contes de fées, nous y croyons parce qu’il nous plaît de croire que nous y croyons.

Aujourd’hui il s’agit de trois divisions françaises qui auraient percé le front, oui per-cé-le-front ! Où ? Quand ? Comment ? Nul ne le sait. Mais c’est officiel, archi-officiel, affiché en toutes lettres sur le mur de la mairie de Gérardmer, et transcrit par notre ravitailleur, homme de confiance.

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