31 octobre 1914. J’ai voulu atteindre le « château Poincaré » à Sampigny.

31 octobre 1914.

J’ai voulu atteindre le « château Poincaré » à Sampigny. Il se trouve sur une pente à l’ouest de la ville. A 500m de l’enclos j’ai laissé ma bicyclette dans un fossé et je me suis avancé en marchant à quatre pattes dans un champ de betteraves. Silence. Pas un obus sur la ville. Allons-y !… Je continue mon lent voyage sous l’œil terrible du Camp des Romains qui m’observe de là-bas. J’ai fait 150m… Je me couche pour me reposer car c’est fatiguant de marcher sur les mains… Je tire mon kodak de sa sacoche… je vais photographier déjà ce que je vois, au cas où je ne pourrais aller plus loin… Là-haut un avion allemand entouré de panaches de fumée vole sur ma tête… Je cherche des yeux une pierre sur quoi poser mon appareil… Je n’en vois point. J’avise alors à quelques mètres de moi un petit tas de fumier qui fera mon affaire… J’oublie de ramper pour y atteindre… Mes 180 centimètres sont probablement repérés instantanément par l’œil du Camp des Romains car

Tiuuuuuuuuuuuuu…Prôfff !

Tiuuuuuuuuuuuuu…Prôfff !

Deux obus tombent coup sur coup dans l’enclos. Je n’en demande pas plus ! Je reviens comme j’étais venu, à quatre pattes dans les betteraves, dont les feuilles pourries me collent aux mains…

Ah ! la propriété de Mr. Poincaré a des gardiens vigilants !…*[…]