28 février 1916. Soleil après la tourmente.



28 février 1916.

Soleil après la tourmente.

Situation stationnaire autour de Verdun, on se bat toujours âprement à la côte du Poivre, sans que les Boches puissent progresser.

Je vais en skis jusqu’à Schmargult. Ah ! Schmargult de l’automne où êtes-vous ? A peine si la neige, par une ondulation, indique votre toit dont on ne voit plus que la grosse cheminée ridicule. Cinq chasseurs habitent là, chargés de patrouiller sur les pentes du Kastelberg. C’est par un trou qu’ils pénètrent dans notre ancienne demeure. Ils occupent ma chambre en haut de l’escalier. La neige a dépassé la hauteur de la fenêtre et l’obscurité la plus absolue y règne. Le toit, au-dessus de ma chambre sert de tremplin pour le saut. Des ailes du bâtiment on ne voit absolument rien. Il y a donc à Schmargult plus de quatre mètres de neige ! Ma petite cabane, que j’avais entourée de tant de soins disparait peu à peu sous la neige et le chemin qui passait, en décembre, à un mètre au-dessous d’elle, arrive aujourd’hui à la hauteur de la fenêtre. Et quel silence ! Depuis notre départ il n’est pas arrivé un obus dans les parages. La neige a comblé les entonnoirs, recouvert les arbres brisés… Schmargult n’est plus au pays de la guerre…

21h Même jour

On a décidé d’ouvrir sur les positions allemandes un violent feu d’artillerie destiné à empêcher le départ pour Verdun d’une division allemande.

A 19h, le tir commence. C’est la batterie Salvert (Altenberg) qui ouvre le feu : ses 75 aboient avec rage et crachent sur Stosswihr. Nos 120, de Montabey, grondent à leur tour, puis nos 155 du Taneck. Le concert devient tumultueux. Peu à peu toutes les pièces du secteur de Metzeral jusqu’au Linge se mettent à hurler, tonner, sonner. Les mitrailleuses du Reichacker, de Sultzeren, du Linge ploploplotent. C’est le grand vacarme. Toute la montagne est illuminée par la flamme des coups de canon, par les gracieuses fusées et par l’immense lueur tremblante et rapide des projecteurs. Les étoiles, impassibles, assistent à ce petit jeu terrestre. Les 155 tirent à obus incendiaires sur Munster qui s’obstine à ne pas brûler. Et puis l’artillerie allemande se met de la partie et nous arrose copieusement : Gaschney reçoit, l’Altenberg reçoit, Ampfersbach reçoit… De la terrasse de la villa Hartmann je contemple ce spectacle toujours grandiose et dont on ne peut se blaser malgré dix-huit mois d’habitude. Par hasard, la Folle respecte ma tranquillité et ce soir elle se tient coi.

21h30 Ho ! ho ! Ca devient bien bruyant. Ma cabane est secouée sérieusement ; rangeons mes flacons de révélateur qui dansent sur leur planche… Le capitaine Salvert tire comme un enragé et nous attire des réponses mal sonnantes. Dans son trou de l’Altenberg, il reste ignoré et c’est notre coin qui « prend ». Le Boche nous envoie en abondance quelque chose comme du 105 ou du 150. Mais tout ça s’accroche, en passant, à la crête et rien ne tombe sur mon toit…

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28 février 1915 : un obus est tombé sur la cabanne que j’avais occupée il y a six jours et a tué ou blessé cinq ou six hommes



Le dimanche 28 février 1915
Ordre de départ à 7 h. nous montons nos sacs et nous restons en tenue jusqu’à 14 h. nous partons ensuite et la 5ème compagnie s’installe sur la pente d’un ravin vers la cote 263. L’artillerie allemande tire sur nous des obus de gros calibre et nous avons en peu de temps des morts et des blessés. Je vais en corvée de matériel à la Pierre-Croisée et je vais porter du fil de fer en première ligne. Je vois beaucoup de morts déchiquetés par les obus. Un obus est tombé sur la cabane que j’avais occupée il y a six jours et a tué ou blessé cinq ou six hommes. Je rejoins ma compagnie dans le ravin. Il n’y a pas eu besoin de ma compagnie en première ligne, nous quittons cet emplacement à 19 h et nous retournons dans les abris de la Pierre-Croisée où nous étions ce matin et où nous passons la nuit tranquille. La 10ème Division attaque Vauquois (46 – 31 – 76 – 313[èmes régiments]).

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23-26 février 1915 : un homme a tué un Allemand qui coupait du bois au fond d’un ravin



Le mardi 23 février 1915
Nous avons pour nous abriter des cabanes humides et tellement basses qu’on ne peut y rester qu’assis. Nous allons passer les nuits dans une tranchée inoccupée se trouvant au-dessus d’un ravin ; nous continuons à creuser et nous plaçons des fils de fer barbelés. La première ligne est à environ 100 m plus en avant. Canonnade et fusillade. Le temps est très froid, il tombe de la neige.

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21-22 février 1915 : une trentaine de cadavres récupérés entre les premières lignes



Le dimanche 21 février 1915
Nous quittons la Pierre-Croisée à 1h 30, et nous allons occuper des tranchées de réserve à la cote 263 où nous arrivons à 4 h 30. Nous nettoyons la tranchée et les boyaux. Le canon de 65 de montagne tire sur les premières lignes allemandes. Il y a des cadavres français et allemands qui sont sur le terrain depuis l’attaque du 17. Nous ne travaillons pas la nuit. Il y a six jours que nous n’avons pas fait de feu. La cuisine se fait toujours par escouades dans le ravin des Courtes-Chausses.

Le lundi 22 février 1915
Pendant la nuit les brancardiers sont allés chercher des cadavres entre les premières lignes françaises et allemandes et en ont apporté une trentaine derrière notre tranchée ; ils étaient sur le terrain depuis le 17, et il en reste encore beaucoup qu’on ne peut pas aller chercher. Un obus de 75, tiré trop court, éclate dans une tranchée française et fait six blessés. Un obus allemand tombe auprès de la cabane du capitaine et blesse l’adjudant Laffitte, de la 5ème compagnie.

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