13 décembre 1917. Le médecin Regnault, le pharmacien Plouchart et Tintillier, l’employé de banque, vont chaque matin à la chasse aux canards



13 décembre 1917. Pusy

Le médecin Regnault, le pharmacien Plouchart et Tintillier, l’employé de banque, vont chaque matin à la chasse aux canards. Ils partent à l’heure où le jour s’annonce par une traînée rose derrière la colline d’Epenoux. Regnault a les moustaches mouillées comme celles d’un chien barbet, Plouchart est vêtu de jonc et Tintillier souffle dans un divertissant appeau. Ils se taisent. L’émoi du meurtre les sert à la gorge. Je les regarde par mon carreau où il y a des fleurs de glace. Ils font trois ombres titubantes sur l’écran de l’aurore et puis ils disparaissent dans le vallon où coule entre des saules le ruisseau de Pusy. Moi, je me recouche sous mon édredon en duvet d’oie.

J’entends sonner l’angélus de sept heures. Et puis j’entends deux coups de feu… Pauvres canards ! Et puis j’entends aussi le canon d’Altkirch… pauvres hommes ! Moins pauvres dans mon cœur cependant que les innocents jolis canards que pourchasse le cruel Regnault. On me dira : « Vous ne les plaindrez plus quand ils seront dans votre estomac. » Et l’on rira bruyamment.

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