1er janvier 1917. Dans la nuit, les Zaian ont démoli de fond en comble l’ouvrage en pierres où s’abritent les vedettes



1er janvier – Mrirt*

L’année nouvelle est entrée ce matin dans ma chambre, la main sur le cœur, le visage énigmatique et souriant, le pas glissant et feutré, et de ses lèvres minces à peine entr’ouvertes s’échappèrent quelques syllabes chantantes… La bes alik… Point de mal sur toi !…

C’était Bouchaïb qui venait me réveiller et me saluait comme chaque matin.

Et je me rappelle Dupré, mon ordonnance d’alors, entrant bruyamment dans ma cabane des Vosges, il y a un an jour pour jour, et me déclamant d’une voix étranglée et cérémonieuse : « J’vous la souhaite bonne et heureuse. » Et il ajouta en clignant son œil de Champenois madré : « … et puis, la fuite ! » Il tombait sur les tristes sapins meurtris un mélange de pluie et de neige fondue.

Aujourd’hui, un long rayon rose, comme je suppose qu’il en émane du sourire des anges, s’est glissé par la porte qu’entr’ouvrait Bouchaïb et s’est posé sur mon front.

Dans la nuit, les Zaian ont démoli de fond en comble l’ouvrage en pierres où s’abritent les vedettes1 ; à Paris, cette nuit-là, on démolit les réverbères et l’on décroche les enseignes des boutiques. Les Zaian réveillonnaient-ils ? Ils vinrent jusqu’au potager, je fus réveillé vers minuit par les coups de feu des sentinelles. J’aperçus des formes blanches qui glissaient sous la lune.

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Les sentinelles

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Une réponse à 1er janvier 1917. Dans la nuit, les Zaian ont démoli de fond en comble l’ouvrage en pierres où s’abritent les vedettes

  1. ponsard patrice dit :

    Ah les sacrés zaïans, ils ne craignent vraiment rien ! des gars hardis et vaillants !
    Heureusement que les vedettes n’étaient pas dans leur gourbi de veille, sinon elles auraient été proprement égorgées…
    Le réveillon des koufars, ce n’est pas leur tasse de thé (vert) aux courageux Zaïans !
    Ils laissent cela aux embusqués de tout poil confortablement planqués à Paname…

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