14 mai 1915 : En quittant les tranchées, un pétard de cheditte blesse trois hommes



Le vendredi 14 mai 1915
Nous quittons à 4 h les tranchées de la cote 285 et nous allons au repos au Claon en passant à travers bois. Nous y arrivons à 9 h et nous sommes logés dans des cantonnements assez propres. Le caporal Amboise, les soldats Montigny et Lhuillier, de la 2ème section, en se promenant dans un pré, ont heurté un pétard de cheddite non éclaté qui, en explosant, les a blessés tous les trois. Ils sont évacués aussitôt. Nous avons repos toute la journée.

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13 mai 1915. Ce matin à 8h on m’a délicatement déposé dans le train de Neufchâteau



13 mai 1915. Contrexéville-Neufchâteau

Ce matin à 8h on m’a délicatement déposé dans le train de Neufchâteau, accompagné d’une miche de pain, de deux ronds de saucisson et d’une tranche de gruyère. Et adieu, Contrexéville. En route pour l’inconnu.

A Mirecourt, en changeant de train, je me heurte à Cordonnier, qui, à peine guéri, rejoint le régiment. Il a appris à Epinal que Plaisant était prisonnier, Voilqué tué. Ce sont les seules certitudes qu’il ait sur nos pauvres camarades. Nous parlons pendant deux heures du régiment. Ouf ! cela élargit momentanément le cercle de mes idées.

A Neufchâteau, après que j’eus quitté Cordonnier, ledit cercle se rétrécit à nouveau. On m’enferme dans une grande salle peinte à la chaux, puant le crésyl, « réservée à MM. les officiers ». Deux vasistas l’éclairent. Nous sommes deux dans cette prison où vient nous visiter de temps à autre un geôlier chargé de nous empêcher de fumer. Mon compagnon de geôle est le jeune lieutenant Genevoix, du 106ème, agrégé des lettres. Il a le bras gauche mi-arraché. Comme moi, il a été blessé à la tranchée de Calonne.

(Bedel a joint en note écrite à l’encre bleue : « il s’agissait de l’écrivain de guerre Maurice Genevoix 1»)

Aux questions anxieuses que nous nous posons sur notre sort, un médecin à mine longue et à poil rare répond d’un hochement de son cou maigre.

Enfin à 18h il vient nous annoncer qu’un train sanitaire va être formé. Départ à 20h.

A 19h vient nous rejoindre un s/lieutenant du génie qui a 14 ans de Côte d’Ivoire et 18 éclats d’obus dans la peau. Il nous conte à la fois des chasses à l’hippopotame et la façon dont, au bois d’Ailly, il faisait sauter les Boches à la mine. Il est l’auteur récent de trois explosions ayant déterminé chacune un entonnoir de trente à trente-cinq mètres de diamètre et ayant englouti trois compagnies entières d’Allemands.

Ainsi passe notre temps. Nous écoutons ce chasseur-mineur. 20h le train ne part pas. 21h le train ne part pas. A 22h30 enfin il s’ébranle.

Nous partons vers l’inconnu.

1 Lorsque Bedel recevra le prix Goncourt, Genevoix lui écrira en lui rappelant l’épisode de Neufchâteau. Ce sera le début d’une longue amitié entre les deux écrivains.

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12 et 13 mai 1915 : une pluie de crapouillots allemands qui nous ont bouché les oreilles par leurs éclatements



Le mercredi 12 mai 1915
Nous n’avons besoin que de quelques sentinelles et je peux dormir toute la nuit, autant que les poux veulent bien me laisser dormir, car nous en avons tous, même le commandant. Nous faisons quelques corvées dans le jour. L’aspirant Tostain arrive à la compagnie.

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11 mai 1915 : une fusée a mis le feu en tombant à quelques mètres de la première ligne allemande



Le mardi 11 mai 1915
Les deux sections de première ligne sont remplacées par les deux autres sections. Je vais en deuxième ligne. Nous faisons des corvées de matériel et divers travaux. Nous lançons 50 crapouillots sur les tranchées allemandes en tirant par-dessus nos premières lignes.

L’artillerie allemande riposte et écrase nos tranchées et nos boyaux. La première ligne est démolie sur dix mètres de longueur. Les soldats Autrique et Jacquemin, de ma section, sont blessés. Vu aéroplanes français et allemands. Nos avions sont toujours fortement canonnés. La nuit est calme. Une fusée éclairante française a mis le feu en tombant à quelques mètres derrière la première ligne allemande. Les branches mortes et la bruyère brûlent facilement et le feu s’étend rapidement. On craint un moment qu’il atteigne la forêt plus boisée. Les Allemands sortent de leur tranchée et nous en voyons une dizaine qui vont piétiner sur le feu et qui réussissent à l’éteindre. Pendant ce temps là, nous saisissons nos fusils et nous tirons dans le tas, et en profitant de la lueur de l’incendie pour guider notre tir. En entendant les coups de feu, les Allemands redescendent dans leur tranchée, mais ils avaient eu le temps d’éteindre le brasier. C’est la guerre. En toute autre circonstance nous aurions été leur donner de l’aide pour venir à bout d’un fléau qui eût pu devenir aussi dangereux pour nous comme pour eux.

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