15-23 avril 1918 : vous allez dire que je suis tout le temps sous terre et c’est vrai



Le lundi 15 avril 1918
L’adjudant Gardie, de la 23ème compagnie, est nommé sous-lieutenant au 5ème bataillon ; l’adjudant Grillet, de la 21ème compagnie, est nommé sous-lieutenant à la 22ème compagnie, il est affecté à la 1ère section. Il y a une séance de cinéma à 19 h dans une maison de Vignéville.

Le mardi 16 avril 1918
Bains-douches pour ma compagnie. Réunion des officiers et sous-officiers à 13 h. Le commandant Chevallier nous donne des instructions pour la prochaine période de tranchées. Séance de cinéma à 19 h.
Le mercredi 17 avril 1918
Huitième et dernier jour de repos. Tout le 6ème bataillon quitte Vignéville à 19 h 30. Nous passons par Montzéville et la cote 232. Nous arrivons au Poste de Commandement (P[oste de] C[ommandement]) Rouen à 21 h 30. Nous recevons une rafale d’obus à gaz et nous mettons nos masques. Nous remplaçons en réserve la 14ème compagnie. Je loge avec les sergents Pilon et Delidais dans un abri propre et bien aéré. La section est logée dans quatre abris, dans la tranchée Sonnois.
Le jeudi 18 avril 1918
Repos le jour. Les chefs de section vont reconnaître les travaux à exécuter. Je vois le village d’Esnes tout démoli au midi de la cote 304, à 2 km d’ici. Il tombe quelques obus dans notre secteur. Trois sections de la compagnie vont travailler à creuser la tranchée Blanchard de 20 h à 1 h. Il tombe un peu de neige et le temps est froid. Nous sommes à environ 800 m de nos cuisines et nous y allons de jour à la soupe, nous mangeons à 11 h et 17 h.
Le vendredi 19 avril 1918
Bombardement de la tranchée Sonnois de 15 à 17 h. Trois obus de 77 viennent tomber auprès de mon abri, nous restons dans nos abris. Nous allons au travail à la tranchée Blanchard de 20 à 24 h. Le temps est très froid, il a gelé à glace.
Vendredi 19 avril 1918

Mon cher père,

Je vous écris du fond de mon abri souterrain, vous allez dire que je suis toujours sous terre, c’est bien vrai. Ici, tant que notre présence à la surface du sol n’est pas nécessaire, il nous faut rester dans nos abris à cause du bombardement qui, sans être trop violent, se produit à n’importe quelle heure. Et puis aussi pour ne pas être vus. Il est deux heures de l’après‑midi mais à 6 mètres sous terre je suis obligé d’avoir de la lumière. Nous ne pouvons plus trouver de bougies, le ravitaillement ne nous en donne pas non plus, mais il nous donne du pétrole. J’ai donc fabriqué une petite lampe avec une bouteille d’eau de Cologne, une mèche d’amadou qui traverse le bouchon, et avec un verre de pétrole j’en ai pour 24 heures. Il faut bien s’ingénier. Pendant huit jours nous sommes logés à 3 km des lignes et nous allons travailler en ligne toutes les nuits ; dans la journée nous sommes tranquilles. Les huit autres jours nous resterons à notre tour en 1ère ligne.

Hier soir et ce matin il tombait un peu de neige fine et [en] ce moment il fait beau et doux, ça change bien vite. La terre reverdit dans les endroits où il n’est pas tombé d’obus et même dans les vieux trous de 1916.

Je n’ai toujours besoin de rien, il y a une coopérative à 600 m d’ici qui vend du vin rouge à 0.75 F le litre. A ce prix-là ça ne peut pas être du Bou[rguei]l. Il y a également de l’épicerie.

Avez-vous retrouvé la clef de l’armoire ? Je vous avais indiqué dans une lettre où j’aurais pu la mettre sans y faire attention, je n’ai pas su si vous l’aviez retrouvée. Je n’avais pas attaché tous les ceps qui se trouvent le long de la maison, vous pourrez les attacher avant qu’ils soient trop poussés. J’ai dans ma section un caporal qui est de Saint‑Antoine‑du‑Rocher et qui a des parents à Saint‑Patrice et Langeais, nous parlons souvent du pays ensemble. Santé très bonne.

Je vous prie d’agréer mes respectueuses salutations.

Votre fils dévoué ‑ H. Moisy
Le samedi 20 avril 1918
Les Allemands bombardent encore la tranchée Sonnois à 15 h, l’homme de liaison de la 3ème section – Boutron – est gravement blessé en portant un ordre du P[oste de] C[ommandement] Le Havre au P[oste de] C[ommandement] Rouen, il est mort une heure après sa blessure. Nous allons travailler de 20 h à 24 h.
Le dimanche 21 avril 1918
Pas de bombardement sur nos abris. Ma section est de piquet et ne va pas au travail cette nuit. Les trois autres sections y sont comme tous les jours. La 3ème section posait des fils de fer et au cours d’un petit bombardement il y a eu trois blessés dans cette section.
Le lundi 22 avril 1918
Nous travaillons à la tranchée Sonnois de 5 à 7 h. Nous avons ensuite repos toute la journée. Nous allons travailler à la tranchée Blanchard de 20 à 24 h. Je rentre avec le sous-lieutenant Tuffreau par le boyau Bièche. Le sergent Dalbavie qui avait été évacué le 7 avril à Sivry-la-Perche revient à la compagnie.
Le mardi 23 avril 1918
Travail de 20 à 24 h à Blanchard. Temps nuageux et froid. Les permissions sont rétablies à 3 %. Il en partira demain et les jours suivants.

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