25 décembre 1915.
Les guerres ont les Noëls qu’elles méritent. Celle-ci a un Noël de pluie, de tempête et de boue, en harmonie avec la vie de tranchées.
Toute la nuit et toute la journée il a plu. Et je ne connais rien de plus mélancolique que la pluie tombant sur la neige. A minuit, les Allemands ont manifesté en tirant quelques salves de 105 et de 130 sur Metzeral où ils supposaient probablement que l’on faisait ripailles. Tristes ripailles dans ces ruines puantes et inondées ! Non, cette année, nous n’avions pas le cœur à réveillonner. Trop de misère à la longue tue jusqu’aux traditions les plus chères.
A l’Hartmann les affaires ont continué à mal marcher. Nous avons, à l’heure qu’il est, perdu tout ce que nous avions conquis. Mon cher 22ème bataillon alpin a, une fois de plus, laissé sur le terrain les deux tiers de ses braves. Le Braunnkopf, l’Altmatt, l’Hilsenfirst sont redevenus calmes sous les agitations formidables de l’atmosphère.
Bas le moral à Metzeral en cette sinistre fin d’année 1915…
Hélas l’an 1916 ne sera guère plus aimable , dans deux mois la bataille de Verdun va se déclencher et dans six celle encore plus meurtrière de la Somme…
Heureusement l’ami Bedel ne le sait pas , ses camarades de combat non plus, sinon le moral plongerait carrément …