30 août 1915. Epinal
Après quatre mois d’éloignement, je reprends le chemin de la guerre… Comme il me parait lent, le rapide de Nancy et comme Epinal est loin ! Je retrouve, après plus d’une année, un Nancy toujours calme, aussi calme qu’une capitale de la Normandie ou de la Provence. Je passe à Charmes, départ pour les Hauts-de-Meuse, pour la guerre de tranchées… C’était hier.
Voici Epinal. Voici des médecins, des officiers d’administration… que de médecins ! que d’officiers d’administration ! Voici des cafés où des médecins jouent au bridge avec des officiers d’administration et voici le Cercle où des officiers d’administration jouent au bridge avec des médecins. Je n’ai pas besoin d’en voir plus long pour affermir davantage encore en moi la résolution que j’ai prise de retourner sur le front.
Je me présente au médecin-chef de la Place. « Retourner sur le front ! Diable. Diable… Qu’est-ce que vous me demandez là ? Pas facile… Réglements… Circulaire… Justin Godart… Allez voir le directeur du service de santé de la 21ème région à Chaumont. Vous vous débrouillerez avec lui… » Bon ! me voilà fixé. Il va falloir lutter contre les règlements, creuser des tranchées, tendre des réseaux barbelés contre les Circulaires, attaquer les articles n° 1, 2, 3, 4… comme autant de corps d’armée. Allons-y !
surprenant ces difficultés pour aller au front, alors que les besoins y sont manifestes compte tenu des pertes …Ceci nous inciterait à comprendre les médecins et les officiers d’administration qui préfèrent jouer au bridge plutôt que de se coltiner avec une réglementation absurde…
Déjà à l’époque un triste exemple de la » spécificité française » …
Alors saluons bien bas le courage et l’opiniâtreté de Maurice Bedel à vouloir retourner au casse-pipes à tout prix !