23 août : Henri Moisy face à un ennemi qui « avance à grands pas »



Le dimanche 23 août 1914

Réveil à 5 h. Rassemblement du 331ème au nord de Longuyon. Le régiment se reforme presque complètement, n’ayant pas eu de pertes hier. Nous retournons vers la ligne de feu et nous arrivons à Viviers-sur-Chiers dans une vallée assez étroite et profonde. Les obus français et allemands passent au-dessus de nos têtes et vont éclater en avant et en arrière de nous.

Ma compagnie (20ème) est auprès du cimetière. Nous recevons l’ordre de nous replier et nous revenons en arrière, vers Revémont. Nous traversons la ligne de Longuyon à Longwy. Les obus nous suivent dans nos mouvements, nous avançons et nous reculons à plusieurs reprises. Les régiments actifs sont en avant de nous et nous n’avons pas encore vu d’Allemands, nous suivons les fluctuations de la 1ère ligne. Vers 17 heures nous nous replions vers Longuyon à travers les champs d’avoine dans lesquels nous disparaissons complètement. Nous descendons la côte qui se trouve devant la gare et nous retraversons Longuyon au pas accéléré et sans nous arrêter. Les habitants qui nous avaient acclamés il y a trois jours font maintenant leurs préparatifs pour quitter la ville, beaucoup sont déjà partis et il est temps. L’ennemi avance à grands pas, maintenu et retardé dans sa marche par ce qui reste des régiments actifs du 5ème Corps d’Armée. L’artillerie allemande allonge son tir et les premiers obus éclatent au-dessus de la ville. Nous marchons sans arrêt vers le sud. Nous nous arrêtons un moment pour servir de soutien à une batterie de 75 qui tire sans interruption pour arrêter la marche de l’ennemi et permettre l’évacuation de Longuyon par la population civile. Cette batterie étant obligée de se replier nous continuons notre marche en arrière. Nous nous arrêtons de nouveau auprès d’une grande ferme couverte en tuiles, qui se trouve au milieu des champs d’avoine et sur une crête ; quelques heures après les obus tombent sur cette ferme et nous continuons à reculer. Nous subissons le feu des canons, mais pas beaucoup celui des fusils, je n’ai pas encore vu d’Allemands. Nous arrivons à la tombée de la nuit à Saint-Laurent-sur-Othain et nous cantonnons, au moins dix mille hommes de toutes armes sur le bord de l’Othain ; nous allons chercher des gerbes de blé et d’avoine jusqu’à 1 km à la ronde pour nous coucher. Nous touchons des vivres à 21 h et nous faisons la cuisine en plein air. Nous passons la nuit dehors, assez tranquilles, en attendant les événements de demain qui promettent d’être mouvementés. A Longuyon, les derniers trains quittaient la gare, emmenant des habitants ; temps beau et très chaud toute la journée.

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