Je ne crois pas que nous ayons la paix encore cette fois-ci



Le mardi 26 décembre 1916
Je recommence un cours de grenadier avec le sous-lieutenant Colette dans un terrain à l’est du camp, près de Courlandon. Temps humide.

Le mercredi 27 décembre 1916
Exercice de lancement de grenade matin et soir. Nous apercevons trois ballons observateurs en l’air, dont un tout près de nous. Quatre aéroplanes allemands ont survolé la région et jeté trois bombes sur Marlieux. Elles sont tombées au milieu des champs. Ils ont été canonnés par l’artillerie française et sont rentrés dans leurs lignes après avoir bien observé la région. Temps clair et beau.

Oblitérations de l’enveloppe : TRESOR ET POSTES 10 28 DEC

BOURGUEIL INDRE ET LOIRE 30 12

Mercredi 27 – 12 – 1916

Ma chère Eugénie,

Reçu ce soir ta lettre du 24. Dans une lettre que j’adressais à Papa le 25, je lui disais que j’avais assisté à la messe de minuit. Si tu étais bien au chaud quand tu m’as écrit ta lettre, j’étais également bien à l’abri à la même heure. Nous avons veillé jusqu’à onze heures tous ensemble et nous sommes partis à la messe ensuite. Vous n’avez pas à me plaindre en ce moment. J’ai bien moins de mal qu’à Romorantin, je gagne plus et je ne cours plus de risques. Il est vrai que je suis moins bien nourri et moins bien couché. Et je suis sûr que tous ceux qui savent que je suis au front me plaignent gros comme les bras. Les vrais embusqués sont dans la zone des armées. Il en est qui sont dans la situation où je me trouve en ce moment, et pour tous ceux qui les connaissent ils sont considérés comme étant au front, pourtant ils ne sont pas malheureux. Pour mon compte, je passerais bien deux ans ici.

Je ne crois pas que nous ayons la paix encore cette fois-ci, ce ne serait pourtant pas à dédaigner.

Par les morts que tu m’annonces, je vois qu’on ne meurt pas qu’à la guerre. Quand nous rentrerons, à la paix, nous serons tout surpris de ne plus voir telle ou telle personne qui existait avant la guerre.

Aujourd’hui, le temps était clair et beau. Plusieurs Taubes sont venus survoler la région et ont lâché quelques bombes, sans accident, c’était plutôt une distraction. Je suis occupé en ce moment à faire des exercices de lancement de grenades. Je me porte bien et souhaite la même chose à toute la famille. Mes meilleurs vœux de bonne et heureuse année pour 1917. Je t’embrasse de tout mon cœur. Ton frère, ‑ H. Moisy
Le jeudi 28 décembre 1916
Exercice aux grenadiers le matin. Vaccination l’après-midi pour le 331ème. Je ne suis pas vacciné, ayant eu la fièvre typhoïde il y a un an. Je vais au bureau du commandant. Forte gelée. L’état-major de la 10ème Division est à Maizy, au bord de l’Aisne. Le 331ème est toujours en tranchées à Craonelle. Depuis deux jours une coopérative militaire fonctionne à Baslieux, pour le D. D. 10ème D. I. [Dépôt Divisionnaire de la 10ème Division d’Infanterie].
Le vendredi 29 décembre 1916
Exercice le matin. Marche le soir de 10 à 19 h par Courlandon, Romain, Ventelay, sous la direction du capitaine Cosson, du 31ème.
Oblitérations de l’enveloppe : TRESOR ET POSTES 10 31 DEC—BOURGUEIL INDRE ET LOIRE 3 01 17

Vendredi 29 – 12 – 1916
Chère Eugénie,

J’ai reçu ce soir le colis que tu m’annonçais dans ta lettre du 24. Il contenait  du chocolat, du beurre, une boîte de conserves, des petits gâteaux, et était en très bon état.

Je te remercie infiniment, tu m’as vraiment gâté et je vais bien me régaler.

Comme je t’ai écrit il y a deux jours, je n’ai pas d’autres détails à te donner. Santé bonne. Encore une fois merci et baisers affectueux.

Ton frère  ‑ H. Moisy
Le samedi 30 décembre 1916
Pluie jour et nuit. Repos toute la journée. Travaux de propreté. La 24/331ème [24ème compagnie du 331ème régiment d’infanterie] change de baraque. Le commandant Fraticelli part en permission, il a été décoré de la Croix de Guerre hier. Le capitaine Collier qui commande ma compagnie, 20/331ème [20ème compagnie du 331ème régiment d’infanterie], prend le commandement du Dépôt Divisionnaire.
Le dimanche 31 décembre 1916
Je vais à la messe à 9 h ½ à Baslieux et aux Vêpres à 14 h à Fismes. Je visite Fismes de 13 à 16 h. Le pays est très bien approvisionné et il y a beaucoup de troupes. Il arrive au 331ème un renfort de 50 hommes venant de Blois, parmi lesquels le sergent Grosbois que j’ai connu à Romorantin. Temps humide.

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