16 octobre 1916. Une visite au frère, souffrant, du Khalifat Ali ou Hassou



16 octobre 1916. Une visite au frère, souffrant, du Khalifat Ali ou Hassou

Le frère du khalifat Ali ou Hassou m’a fait parvenir par un messager qu’il désirerait avoir ma visite. Il habite un douar des Beni Yaccoub, au bord du Guigou, au-delà des douars des M’rabti de Moha ou Hamon. La khima d’Ali est la plus vaste que j’aie vue jusqu’ici ; elle peut avoir 15 à 20m de long sur six de large. A gauche le coin des hommes et des beaux tapis, à droite celui des femmes et de la cuisine. Cordier m’accompagne (le capitaine Cordier, chef du bureau des renseignements d’Aïn-Leuh, momentanément, comme moi, à Timhadit). Il est neuf heures du matin. Les moutons paissent autour du douar ; cinq chameaux entravés les uns aux autres par les pattes de devant ruminent devant notre khima. Un jeune chameau joue avec mon cheval, il est gentil, maladroit, ridicule comme tous les jeunes animaux, mais, comme il a le cou long pour son âge !

Comme Ali ou Hassou est riche, le repas qu’il nous offre est plus opulent encore que celui que nous prîmes hier chez Moha ou Hamon. Aux boulfef, au tagine de mouton, au méchoui de mouton, au couscous, il faut ajouter un délicieux poulet à la sauce safran, fortement relevé de kari, et des œufs durs servis après les boulfef. Thé à la menthe, comme de juste, entre chaque plat. Nous nous arrachons difficilement aux prières de notre hôte qui voudrait nous garder indéfiniment sous sa tente. L’une des femmes accroupies à droite, loin de nous, est bien jolie avec le fin tatouage qui lui fait comme une mentonnière de dentelle et les trois bandes minces de henné qui descendent de ses tempes à son menton. Je note la tendresse des pères pour leurs enfants favoris. Ils les caressent, les embrassent, leur donnent une belle côtelette, des boulettes de couscous, le fond de leur verre de thé. Le jeune chameau est lui-même admis à notre repas et de son cou allongé démesurément sous le rebord de la khima attrape quelques reliefs de nos keschra.

Quant au malade, qui se plaint de lourdeurs d’estomac et qui vient de manger comme quatre, je lui offre un petit paquet de bicarbonate de soude dont il est très touché.

A 11h par les sentiers qui s’insinuent à travers les laves nous regagnons Timhadit… pour déjeuner. En cours de route un cavalier arrive au grand galop remettre à Cordier un mot du caïd Mimoun. C’est une invitation à nous rendre à une noce, cet après-midi au douar des M’rabti de Moha ou Hamou. C’est un nouveau repas en prévision !…

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