5 décembre 1915. La Bresse
Gros mouvements de troupes dans la région. Les bataillons qui tenaient les tranchées du Reichacker et du Braunkopf sont relevés et sont transportés en automobiles à Cornimont et, de là, probablement dans la région de Thann où il semble que l’ennemi prépare une attaque, à moins que ce ne soit de notre côté qu’elle parte.
Des canons passent, de tous calibres, des 155 et des 120 qui se trouvaient déjà sur d’autres points des Vosges. Des 75, retour de la Champagne et de l’Artois.
Spitzmüller, artilleur-librettiste-feuilletoniste, se grise de musique et de belles paroles dans l’étroit salon de la modeste villa d’un industriel de la Bresse. Il est entouré de quatre jeunes femmes, prétentieusement provinciales, qui se gargarisent de romances et de duo. Et moi, je goûte, dans un profond fauteuil, le spectacle de cette agitation musicale à quelques kilomètres de la ligne de feu.
La messe, à La Bresse, est une grande et magnifique cérémonie. Plus d’un millier de personnes y assistent, y prient et y chantent. Le curé y parle de la guerre en termes élevés, développe le sens des communiqués, trace la géographie de la Macédoine, discute Dwinsk, Goritzia et Monastir. Tous l’écoutent et, vraiment, tous semblent le comprendre. A l’issue de la messe, on dit les prières pour les morts et dans cette vaste église toutes les femmes sanglotent : il en est peu qui ne soient en deuil. Dame ! La Bresse a fourni des soldats exclusivement au 170, au 152 (de Gérardmer) et aux bataillons alpins.