24 novembre 1915. J’ai déjeuné au camp du Gaschney-Kopf



24 novembre 1915.

J’ai déjeuné au camp du Gaschney-Kopf avec notre commandant d’artillerie et le colonel commandant le secteur Reichacker-Braunkopf. C’est dans une forêt profonde de hauts sapins et de rochers, sur la pente occidentale du Kopf, une réunion de huttes dont chacune avec ses parois en troncs de sapins a l’apparence d’une isba sibérienne. Gaschney se trouve derrière la ligne qui descend du Reichacker, coupe l’Altmatt, prend les pentes du Braunkopf et traverse la vallée au sud de Mühlbach pour remonter ensuite les pentes de L’Ilienkopf. Gaschney est à la fois le séjour des états-majors d’artillerie et de chasseurs et le camp de repos des bataillons relevés. Quoique très rapprochés de la ligne qui passe à 1200m de là le camp est difficile à atteindre par l’artillerie ennemie.

Pour y atteindre il nous faut franchir le massif du Hohneck, longer les pentes du petit Hohneck en le contournant et faire ainsi deux heures de marche pénible dans la neige, sous l’œil de l’ennemi qui arrose volontiers le sentier à coups de 210. Par-ci par-là une petite croix dont on voit la pointe émerger de la neige atteste que le marmitage porte ses fruits.

Spitzmuller que j’accompagne à Gaschney, y est convoqué pour prendre des ordres relatifs à un bombardement du Bois-Noir. D’ici quelques jours, à une date et à une heure tenues secrètes, toute l’artillerie du secteur, lourde et de campagne, enverra 3.000 obus en deux heures de temps sur ce petit bois qui se trouve aux lisières de Mühlbach et que traversent les tranchées ennemies. Il s’agit d’un de ces tirs de concentration à la mode depuis quelques mois. Par de savants et quotidiens arrosages on laisse à penser à l’ennemi qu’une attaque d’infanterie se prépare. Il concentre des réserves et quand celles-ci sont massées le tir commence. Tel est le jeu auquel est convoquée notre batterie de 95.

Mais en attendant ce grand jeu elle s’amuse comme une petite folle. N’a-t-elle pas, à deux reprises différentes, démoli aujourd’hui un convoi de ravitaillement qui cheminait dans le ravin au nord-est de l’Ilienkopf.

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