31 mai – 2 juin 1915 : les événements sont favorables, il est possible que nous ne soyons plus longtemps en Argonne



Le lundi 31 mai 1915
Nous quittons les baraquements Bourdelais à 4 h et nous allons aux baraquements Monhoven où nous nous reposons toute la journée. Nous passons aux bains-douches dans l’après-midi. Nous avons eu cinq jours de bon repos. Nous quittons le camp Monhoven à 23 h 30, pour aller aux tranchées du Réduit, à la cote 263.


Le lundi 31 mai 1915 ‑ 16 heures

Mon cher père,

Aujourd’hui dernier jour de repos. Je vais retourner aux tranchées cette nuit. Cela ne m’inquiète pas beaucoup, j’y suis tellement habitué, c’est‑à‑dire que le plus pénible c’est que nous dormons pas toujours autant qu’il le faudrait. A part ça ce n’est pas bien terrible, surtout qu’il fait toujours un temps magnifique.

Les évènements semblent prendre une tournure décisive et favorable, précipités par la participation de l’Italie à la guerre. Il est bien possible que nous ne soyons plus longtemps dans l’Argonne et je voudrais bien, dans un mois, pouvoir vous écrire de la frontière. Ce serait une bonne chose. Si nous prenons l’offensive, je serais heureux de pouvoir suivre toujours les opérations, ce sera plus intéressant que les tranchées. Je vous envoie un petit dessin que j’ai fait sur une écorce de bouleau. Je vous envoie également un petit bouquet semblable à ceux que j’ai envoyés ces  jours‑ci.

Je me porte bien. J’ai toujours très bon appétit, surtout depuis quelques jours que le temps est un peu moins chaud.

A chaque repos nous touchons toujours du linge propre en échange de celui que nous rendons. J’ai toujours de bonnes chaussures et je ne souffre jamais des pieds.

Ma montre marche très bien et ne s’arrête jamais, avec un boîtier qui la protège je ne crains plus de la casser.

Nous avons tous maintenant, dans une enveloppe en caoutchouc, une paire de lunettes comme celles des automobilistes et un pansement muni de galons pour nous couvrir les yeux, le nez et la bouche en cas où les Allemands feraient usage des gaz asphyxiants. Ils ne s’en sont jamais servis dans ma région.

Je pense que vous vous entendez toujours bien avec votre militaire.

Prenez toujours bien soin de mes effets, des plantes, du jardin et de la cour. A mon retour, que j’espère prochain, je pourrai me rendre compte et vous féliciter de votre bonne administration pendant mon absence. Il est probable que vous aurez mes impôts à payer, vous vous en arrangerez pour le mieux, nous règlerons ça plus tard.

Je vous souhaite bonne santé, bon courage et espérance plus que jamais.

Votre fils qui vous aime. ‑ H. Moisy
Le mardi 1er juin 1915
Nous arrivons aux tranchées du Réduit, à la cote 263, à 2 h 30. Nous venions des baraquements Monhoven, à la Croix-de-Pierre, où nous étions arrivés la veille, venant des baraquements Bourdelais, où nous avions passé cinq jours. Nos tranchées de 1ère ligne sont à 12 mètres des tranchées allemandes. Nous remplaçons la 8ème compagnie du 82ème d’infanterie. Canonnade. Temps très chaud.
Le mercredi 2 juin 1915
Aménagé la tranchée et replacé des créneaux. Presque pas de fusillade. Des pièces de 75 placées à Buzémont, près de Vauquois, bombardent les tranchées ennemies qu’elles prennent en enfilade. Il y a beaucoup de mines dans notre secteur. En se plaçant dans des sapes d’écoute, on entend les Allemands piocher en avant de leur première ligne. Beau temps chaud.

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Une réponse à 31 mai – 2 juin 1915 : les événements sont favorables, il est possible que nous ne soyons plus longtemps en Argonne

  1. pponsard dit :

    des impôts à payer ?
    La loi relative à l’imposition sur le revenu des personnes n’étant pas encore votée si mes souvenirs son bons, il doit s’agir des impôts locaux classiques dits  » impôts ménages » …
    Ceci dit que les collectivités locales n’aient pas déjà décidé d’en exonérer les mobilisés qui risquent tous les jours leurs peaux pratiquement  » à l’oeil » sur le front, et qui de ce fait n’exercent plus d’activités lucratives est très surprenant voire même franchement choquant…
    Alors que des margoulins commencent à édifier des fortunes de guerre colossales en trafiquant sur tous les approvisionnements, les divers matériels, l’alimentation, le « pinard », sans compter la grande industrie avec l’armement, notamment l’artillerie et les munitions ad hoc, la construction de véhicules roulants et bientôt de chars d’assaut..

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