26 octobre 1915. Il s’est abattu cette nuit sur notre région une bourrasque du nord-est qui a recouvert les arbres, les herbes, les mousses, les moindres objets d’un givre extraordinaire



26 octobre 1915.  Schmargult

Il s’est abattu cette nuit sur notre région une bourrasque du nord-est qui a recouvert les arbres, les herbes, les mousses, les moindres objets d’un givre extraordinaire. Sous le poids de cette glace les arbres se courbent, des branches énormes se brisent. On dirait, à voir les hêtres ainsi caparaçonnés, des candélabres aux branches envahies par la cire des bougies. Un vieux sergent barbu a dû faire fondre devant le feu sa barbe qui ne formait plus qu’un bloc qu’on aurait pu casser au marteau. Les fils téléphoniques se sont rompus sous le manchon qui les enveloppe. J’ai trouvé des toiles d’araignées « glacifiées » que l’on pouvait briser menu comme du verre filé. Et devant cette extravagance des éléments, cette puissance des jeux de l’atmosphère, je songe aux pauvres petits obusiers de 420, aux minuscules nuages de gaz asphyxiants, aux piluliformes (sic) grenades à mains, à toutes ces inventions que l’homme dans son orgueil qualifie de formidables, de colossales, qui lui font lever les bras au ciel en s’écriant : « Où allons-nous, Où allons-nous ? » Comme si la puissance des guerriers devait détruire, bouleverser, pulvériser la terre ! Que sont dix millions de coups de canon auprès d’un seul coup de vent ?

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19-21 octobre 1915 : après douze jours de tranchées, nous partons ; le régiment a perdu 150 hommes



Le mardi 19 octobre 1915
Canonnade régulière des deux côtés toute la journée. Nous n’avons pas vu d’aéroplanes ce jour. Canonnade de 105 allemands sur notre tranchée qui est prise en enfilade vers 17 h. Le soldat Couturier est tué. Le soldat Viguier et le sergent Grenier sont blessés. Les tranchées sont démolies. A 23 h, un 105 est tombé à un mètre cinquante de l’endroit où j’étais couché et m’a recouvert de terre.

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17-18 octobre 1915 : le spectacle et l’approche de la mort donnent à réfléchir



Le dimanche 17 octobre 1915
Continué à creuser les boyaux jour et nuit. Vu aéros et Taubes. Très beau temps. Le soldat Danet est blessé.

Dimanche 17 octobre 1915 – 13 heures

Ma chère Eugénie,

Reçu hier soir ta lettre du 10. Je vois que tu es toujours très occupée et que si la guerre est dangereuse pour moi, elle est aussi bien fatigante pour vous tous, en raison du surplus de travail qu’elle vous impose. En dehors des victimes de la mitraille, la guerre fera, à l’intérieur, des victimes du surmenage et de l’épuisement.

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