Portraits de militants (2/6). « Soutenir Eva Joly n’est pas réductible à un bulletin de vote »

 « Soutenir Eva Joly n’est pas réductible à un bulletin de vote ». C’est par mail qu’Adrien Gaumé, 36 ans, militant multicarte, « artiviste global », conclut la discussion engagée au Bergerac, un café Tourangeaux. Quelques heures plus tôt, un thé à la main, il a longuement raconté son ralliement aux promesses de changement d’Europe Ecologie-Les Verts. Et ses désillusions.

Activiste multicarte, Adrien Gaumé a pris ses distance avec EELV. Il reste derrière Eva Joly.

Europe Ecologie-Les Verts, pour lui, avec notamment la création de la coopérative et de l’Agora, c’était la promesse de la politique autrement, connectée, ouverte, traversée de réseaux… Le « coopérateur » type, pilier de « L’ Agora » imaginée par les écologistes, c’était lui, tout juste revenu du Mexique avec ses valises traînées sur les chemins de la coopération internationale et de l’économie sociale et solidaire.

D’une voix réfléchie, il circonscrit cette nouvelle strate entre la société civile et les cadres du parti ; habitué à regarder « du local au global » il pense son rôle de bricoleur de happening politique, interpelleur de conscience, philosophe de l’espace public, main dans la main avec des centaines d’autres coopérateurs. Prêts à changer de perspective. Avant de découvrir « l’arrière-cuisine » : les calculs, les arrangements, les ambitions. Le manque d’écoute. 

Voilà comment un militant s’essoufle

Derrière le rideau, ça ressemble «  à tous les autres partis », regrette celui qui flirte avec les Indignés, les casseurs de pubs et autres remueurs de conscience. L’engouement des législatives, l’euphorie de européennes est retombé.  La politique politicienne a repris la main ; les forces vives de la socitété civile sont en sourdine. Le modèle rêvé d’« Europe Ecologie n’est pas formaté pour une échéance présidentielle », assène-t-il.

L'engagement, oui, l'endoctrinement, non.

Finalement, il se dit que « les Verts sont un parti comme un autre ». Pas mieux que le PS, auquel il a adhéré dans une première vie parisienne, pour faire barrage à  l’Ump Pierre Lellouche. Pas pire non plus. Seulement pas encore prêt à appliquer jusqu’au bout ses principes.

Reste Eva Joly. « C’est parce qu’elle était dans l’arène politique » qu’Adrien s’est rapproché du parti. Avec son passé qui assurait que les Verts ne parlerait pas « seulement » d’écologie. Et sa droiture. Sans compter que c’est « une véritable européaniste ». Avec cette candidate, ce penseur de la politique voit une occasion de concrétiser le « dépassement de l’Etat-Nation ».

Laissant « en sommeil » ce fameux – fumeux ? – statut de coopérateur d’Europe Ecologie-Les Verts, Adrien Gaumé se fond donc dans le comité de soutien local à Eva Joly. Pensant retrouver la triade espérée : coopérateurs, militants, sympathisants. «  ça a finalement été une séquence un peu courte pour moi », lâche-t-il. Là encore, « on a vite compris que le parti ferait la campagne à sa manière ». Les élus et les cadres locaux reprennent vite la main sur les pro-joly d’en bas, pilotent le moindre évènement. Las. Adrien milite comme il vit, à la mode poétique. Mais il n’est pas de ceux qu’on endoctrine. Même pour la bonne cause.

Après plus d’un an dans les rangs d’EELV, quelques mois dans le comité de soutien local d’Eva Joly, Adrien ne milite plus pour la présidentielle. Son engagement, politique en tous cas, est en sommeil. Voilà comment un militant s’essoufle. « Après la présidentielle, Eva Joly aura un rôle à jouer » assure-t-il. Il la suivra de prêt. Europe Ecologie aussi, dont « les ambitions programmatiques sont beaucoup plus lisibles, et visibles, pour des échéances comme les européennes ».

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