L’histoire
Les strips muets se sont installés dans les colonnes de la NR. Le quotidien du Centre-Ouest s’étoffe, sa pagination aussi. Un studio Dessin dirigé par un maître du genre, Emile Jacquemin va bientôt imposer des bandes dessinées verticales. En attendant, les services commerciaux de la NR se sont, comme quelques quotidiens de province vont le faire, « mariés » avec les éditions de l’heddomadaire Bonjour Dimanche qui diffuse un supplément Jeunesse intitulé Le petit canard. Il va exister deux séries de ce magazine BD : l’une allant du 9 juin 1946 au 25 novembre 1948 (129 numéros) ; l’autre du 2 décembre 1948 à août 1949 (32 numéros) dont le nom change légèrement devenant Le petit canard pour les jeunes.
C’est cette seconde série (qui passera de huit à douze pages) que va publier immédiatement et intégralement la Nouvelle République toutes les semaines pendant neuf mois. Inutile d’aller fouiller dans les vieilles malles du grenier de grand-mère : les cotes du BDM (1) sont décourageantes. Deux euros l’exemplaire sur le marché de l’antiquité BD, c’est pas cher payé. Et pourtant, ce supplément, mazette, quel journal !
Les auteurs
Commençons par le commencement. Et par Jean Nohain. Késacko Jean Nohain ? demandent en chœur, Nicolas, Samy et Thierry, la Dream Team de Case Départ. Réponse d’Onc’ Erwann.
Jean-Marie Legrand, dit Jean Nohain, dit Jaboune (1900-1981). Avant Nikos Aliagas, avant Guy Lux, avant Jacques Martin, il y a eu Jean Nohain. Animateur radio puis télé (l’émission de variétés Les 36 chandelles), bateleur, découvreur de Fernand Raynaud (comique), parolier de Mireille (chanteuse), symbole des années soixante et de la France « merveilleuse » des trente Glorieuses, il est resté célèbre pour sa bonne bouille et ses expressions du style « bien de chez nous ».
Mais Jean Nohain a été aussi écrivain de livres pour la jeunesse et éditeur avant-guerre de l’hebdomadaire de BD, Benjamin – qu’il avait fondé – dans lequel vont travailler entre autres Alain Saint-Ogan avec Zig et Puce et notre ami Erik. Benjamin est d’ailleurs considéré comme l’ancêtre de Cœurs Vaillants. Grosse activité BD pour Jean Nohain donc, également éditeur, après guerre donc, de ce Bonjour Dimanche dont la NR va publier le supplément pour les jeunes lecteurs. Son nom apparaît d’ailleurs sur la page Une de l’hebdo tamponné Nouvelle République : rédacteur en chef, Jaboune.
Louis Lempereur dit… Poléon (of course !). Superbegraphiste au style rond présent en page Une du Petit Canard (dont il dessine les aventures). Avec son complice Jean Nohain, il est surtout connu (des spécialistes !) pour avoir crée, notamment dans les colonnes du Petit Canard, puis en album chez Calmann-Lévy en 1952, Les aventures de Totorix le petit Gaulois. L’une des premières s’intitulait : « Les Romains seraient-ils les plus forts ? » Par Toutatis ! Suivez mon regard : la légende dit qu’il n’est pas impossible que le Totorix en question ait inspiré un certain Astérix, quelques années plus tard. Décidément, la BD dans la NR mène à tout. Et ce n’est pas fini !
Jacques Faizant (1918-2006). Repéré par Jean Nohain (décidément !) quand il avait quinze ans, celui qui deviendra le caricaturiste le plus célèbre du général de Gaulle et de Marianne à la Une du Figaro, a commencé sa carrière comme dessinateur de BD dans Le Petit Canard en 1946. Eh oui ! En dernière page de l’hebdomadaire, (même s’il a illustré quelques pages Unes comme celle de Noël 1947), il avait implanté son héros, le Colonel Broume (et ses amis Boudoche et Patapoum) avant de tirer sa révérence dans le n°39 de juin 1949.
Parmi les autres dessinateurs du titre, quelques stars du crayon dont Joseph Pinchon (l’immortel dessinateur d’une héroïne nommée Anaïck Labornez dite… Bécassine), ou Martial Durand dit Martial au style proche de celui de Dubout et qui dans Le Petit Canard va créer un Tafia le marin, et un éphémère Professeur Molluse accompagné de Burett le robot. Les dessinateurs aiment bien les professeurs à cette époque…
Enfin, cerise sur un gâteau déjà copieux, la présence dans l’hebdomadaire de Jaboune, du fils de Lariflette, mais oui. Daniel Laborne, qui a crée le brave bonhomme en polo de marin en 1939 (et en dessinera plus de 10.000 planches jusqu’en 1988 !), lui avait donné un rejeton : Tatave, fils de Lariflette qui ne sera présent que dans les pages du Petit Canard pour les jeunes, deuxième série, donc celle qu’ont donc pu dévorer les petits lecteurs de la Nouvelle République de mars à juillet 1949. Incroyable !
(1) BDM, l’argus officiel de la BD (Michel Bera, Michel Denni, Philippe Mellot. Aux éditions de l’Amateur)
Et dire qu’à une époque, PQR avait un supplément BD… Je suis né trop tard !
Ceci dit, avec Jacques Faizant dedans … Pas trop ma tasse de thé
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Une très belle découverte ce Petit Canard. Dommage en effet que la presse BD, et la BD dans la presse, soient disparues.
Ce blog est un régal.
supplement de bonjour dimanche,le petit canard avec que des illustrateurs dessinateurs tous disparus de st ogan faizant j p pinchon etc ,j’avais 4 ans et je decouvre au hasard d’un vide grenier cette bd que je n’avais jamais entendu parler malheureusement incomplet mais que du bonheur