8 mar 2012
Chloé Bossard

Immigration : ce que proposent les partis

Entre la polémique sur la viande halal, le débat sur le vote des étrangers aux élections locales, et la volonté de réduire le nombre de régularisations, l’UMP s’embrouille les pinceaux et s’attire les foudres du Front national et de la gauche. L’immigration, l’un des thèmes forts de la campagne de 2007, revient donc cette année encore hanter les débats de la présidentielle.

(Photo NR/Patrick Lavaud)

Nicolas Sarkozy stagne sur l’immigration choisie

Donné perdant dans les sondages, Nicolas Sarkozy joue le tout pour le tout en radicalisant ses propositions. Le candidat de l’UMP a déjà exprimé son intention de durcir les conditions du rapprochement familial : le conjoint devra avoir un travail, un logement décent, et s’être engagé à apprendre le français.

Déroulant, comme en 2007, le thème de l’immigration choisie, Nicolas Sarkozy appelle à « faire correspondre à nos capacités d’accueil ». Il s’est donc engagé à « réduire le nombre des arrivées sur notre territoire ».

François Hollande veut sécuriser l’immigration légale

Au Parti socialiste, la proposition d’accorder aux étrangers résidant légalement en France depuis cinq ans le droit de vote aux élections locales a fait grand bruit. Au delà, François Hollande s’engage dans ses « Soixante propositions pour la France » à conduire une lutte « implacable » contre l’immigration clandestine et à « sécuriser » au contraire l’immigration légale. S’il est élu, les régularisations seront ainsi opérées « au cas par cas sur la base de critères objectifs ».

Le candidat à la nationalité devra notamment avoir un travail, « même s’il est clandestin », une attestation d’une présence continue sur le territoire, et « la réalité d’une famille en France ». Il devra également prouver sa bonne intégration. Le programme ne donne aucun détail sur le nombre de régularisations prévu, ni sur ses modalités exactes. Aujourd’hui, la France opère 30.000 régularisations par an.

Sur l’immigration professionnelle également, François Hollande reste flou. Dans l’émission Des paroles et des actes en février, il a récusé l’appellation d’immigration choisie, lui préférant celle d' »immigration intelligente ». Mais il ne s’est pas avancé sur les secteurs ou les métiers concernés.

François Bayrou reconnait les « réussites » de l’immigration

Sur son site de campagne, François Bayrou reste très succint. « La priorité, pour moi, c’est de mieux reconnaître les réussites issues en particulier de l’immigration, de leur donner toute leur place et leur reconnaissance dans la société », peut-on simplement lire. Doit-on y voir un remake de l’immigration choisie à la Sarkozy ? A croire que le thème de l’immigration, qui déchire tant ses concurrents, fait peur au candidat du MoDem.

Marine Le Pen veut fermer les frontières

Si un parti saisit ce thème à bras le corps depuis des décennies, c’est bien le Front National. En 2012 encore, Marine Le Pen en fait l’un de ses principaux chevaux de bataille, et vise aussi bien l’immigration légale que l’immigration clandestine. Sur son site de campagne, la candidate part du postulat que l’immigration « déstabilise en profondeur notre société et ses équilibres ». Pour y résister, elle préconise donc une réduction en cinq ans de l’immigration légale de 200.000 à 10.000 entrées par an, « en privilégiant les talents ».

La leader frontiste prône également la suppression du regroupement familial, une réduction de la durée de la carte de séjour à trois ans au lieu de dix, et une réduction drastique du nombre de demandeurs d’asile admis à rester en France grâce à des « révisions constitutionnelles, législatives et réglementaires ». Les accords de Schengen sur la libre circulation des personnes seraient aussi remis en cause, et le droit du sol supprimé : « la France reprendra le contrôle de ses frontières », écrit Marine Le Pen pour qui « être français est un honneur ».

Jean-Luc Mélenchon pour régulariser tous les sans-papiers

Sans surprise, le point de vue de Jean-Luc Mélenchon est radicalement opposé. Pour le candidat du Front de Gauche, « l’immigration n’est pas un problème ». « La haine des étrangers, la chasse aux immigrés défigurent notre République : il faut en finir ! », écrit-il dans son livre-programme. Selon lui, « l’immigration zéro est un mythe », et il ne sert donc à rien de chercher à refouler l’immigration.

Jean-Luc Mélenchon promet ainsi de rétablir la carte de séjour unique de 10 ans et le droit au regroupement familial. Il entend également régulariser tous les sans-papiers, en « décriminalisant » le séjour irrégulier. Les centres de rétention seraient fermés, et le droit au séjour pour raison médicale rétabli. Le candidat promet enfin un nouveau Code de la nationalité, « fondé sur le respect intégral et automatique du droit du sol dès la naissance et sur un droit à la naturalisation permettant à tous les étrangers qui le souhaitent d’acquérir la nationalité française au-delà de cinq ans de résidence ».

Eva Joly définit des « critères objectifs » de régularisation

Eva Joly se positionne sur le même créneau, en choisissant de déconnecter les politiques d’immigration du Ministère de l’Intérieur (la Justice, les Affaires étrangères, l’Emploi et les Affaires sociales se partageront la tâche). La candidate d’Europe écologie-Les Verts annonce également la définition de « critères objectifs » pour la régularisation des sans-papiers. Elle mentionne notamment la présence sur le territoire depuis plus de cinq ans, la scolarisation d’un enfant ou encore le fait d’avoir un travail.

Concernant les centres de rétention, la candidate écologiste ne prône pas leur fermeture mais plutôt un assouplissement. « Le placement en centre de rétention ne sera plus la règle mais l’exception », en cas de menace à l’ordre public, mentionne notamment son programme. Enfin, elle va plus loin que François Hollande en promettant d’accorder le droit de vote aux étrangers non communautaires qui résident depuis cinq ans en France à toutes les élections.

Nathalie Arthaud vante une classe ouvrière « universelle »

Comme à son habitude, la candidate trotskyste Nathalie Arthaud cite Karl Marx sur son site de campagne : « Les pro­lé­tai­res n’ont pas de patrie ». Selon elle, la classe ouvrière doit être unie, quelle que soit l’origine des travailleurs. La porte-parole de Lutte ouvrière prône donc l’attribution du droit de vote aux étrangers dans toutes les élections. « Écarter plu­sieurs cen­tai­nes de mil­liers de tra­vailleurs de ce droit élémentaire est un déni de droit, du même type qu’a été le refus du vote des femmes pen­dant si long­temps ou le suf­frage cen­si­taire », estime-t-elle.

Dans cette droite ligne, la candidate propose la régu­la­ri­sa­tion des tra­vailleurs sans-papiers et l’arrêt des expul­sions et « des contrô­les au faciès ». Selon elle, « participer aux luttes col­lec­ti­ves de leur classe sociale est, dans cette société, le seul moyen pour les tra­vailleurs immi­grés de réus­sir leur inté­gra­tion ».

Dominique de Villepin pour « la fierté d’être un pays d’accueil »

Dominique de Villepin souhaite permettre à la France de retrouver « la fierté d’être un pays d’accueil ». Le candidat de République solidaire propose d’instaurer un titre de séjour unique et progressif comportant des devoirs et des droits, notamment l’enseignement du français.

D’autre part, le candidat souhaite prendre en compte un « droit aux allers retours », dans une logique de codéveloppement avec les pays d’origine. Il espère ainsi dépasser le « déni » en matière d’immigration clandestine pour retrouver « la clarté, la fermeté et la visibilité ».

Nicolas Dupont-Aignan veut réduire de 50% le nombre d’immigrants

Nicolas Dupont-Aignan, quant à lui, souhaite réduire de 50% le nombre d’immigrants pour le prochain mandat, afin de « tenir compte d’un climat économique plus difficile ». Pour y arriver, il entend notamment « intensifier l’aide au développement en faveur des pays d’émigration ». Comme Marine Le Pen, le candidat de Debout la République veut « dénoncer les accords de Schengen » pour rétablir le contrôle des frontières.

Pour lui, l’acquisition de la nationalité doit être conditionnée au « respect des principes républicains » : scolarisation des enfants, interdiction de la polygamie, apprentissage de la langue française, laïcité, etc. Les employeurs de clandestins verraient leurs peines renforcées, et les jeunes mariés devraient attendre cinq ans avant d’acquérir la nationalité, pour lutter contre les mariages blancs.

Enfin, Corinne Lepage indique simplement qu’elle lancera un référundum sur le droit de vote des étrangers aux élections municipales, en cas d’élection.

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