Les engagements des candidats : la jeunesse, l’école et l’éducation (6/10)
Tous les acteurs du monde éducatif s’accordent pour le dire : l’école va mal. Résultats en baisse au primaire, échecs scolaires au collège, difficultés d’orientation au lycée et problèmes d’insertion dans le monde professionnel à l’université ternissent l’image de la France en Europe et dans le monde. Mais si les candidats à la présidentielle s’accordent sur la volonté de redonner à l’école de Jules Ferry toutes ses couleurs, leurs copies sont divergentes. Au lecteur à présent de les noter.
- (Photo NR)
Nicolas Sarkozy. Dans la droite ligne de sa politique de professionnalisation, le président sortant propose de généraliser l’alternance en dernière année de bac pro et de CAP, au cours de laquelle les élèves passeront 50 % de leur temps en entreprise. Comme il l’a répété lors de plusieurs meetings, il ne compte plus accepter qu’un enfant rentre au collège sans savoir lire, écrire et compter. Pour cela, il prévoir une prise en charge systématique des élèves de maternelle ou de CP en grande difficulté. Au collège, les professeurs devront être présents en dehors des heures de cours pour soutenir les élèves qui en ont besoin, en contrepartie d’une augmentation de leur rémunération. Dans l’enseignement supérieur, Nicolas Sarkozy souhaite créer une « banque de la jeunesse » qui se portera caution pour les jeunes et leur permettra de financer leurs études ou un projet de création d’entreprise. Enfin, il veut renforcer l’accueil des jeunes handicapés au lycée et dans les universités.
François Bayrou. En premier lieu, le président du MoDem propose d’écrire un « Contrat de progrès » entre l’école et la nation pour garantir le maintien des moyens et préciser les objectifs assignés à l’école. Les méthodes pédagogiques seraient définies par l’évaluation des résultats : « ce n’est ni au gouvernement ni au président de la République de trancher des méthodes d’apprentissage, c’est à la classe, au résultat effectif, à condition qu’aucune méthode ne se voie exclue pour raison idéologique », écrit-il dans son programme. François Bayrou compte également fixer comme objectif la maîtrise de la lecture et de l’écriture à l’entrée au collège. Sinon, une pédagogie adaptée devra être mise en place. Il veut par ailleurs maintenir le nombre d’enseignants et leur statut, notamment en revoyant leur formation : maintien des concours de recrutement nationaux et remise en place d’une année de formation en alternance. Une fois enseignants, ils seraient notés par des « évaluateurs expérimentés ». Ensuite, les chefs d’établissement auraient de nouveaux pouvoirs, dont celui de recruter directement des remplaçants.
Du côté des élèves, François Bayrou veut consacrer 50 % du temps de travail à l’école primaire à la langue française, mais aussi limiter l’emploi du temps des élèves à 28h maximum, penser le nombre d’élèves par classe en fonction de la réalité de la classe (à classe difficile petit effectif) et favoriser les activités artistiques et la créativité intellectuelle. Enfin, le candidat centriste compte créer des écoles associatives de parents pour aider ceux qui ont des difficultés à accompagner leur enfant, puis donner aux élèves de l’enseignement professionnel une information sur les métiers tout au long du collège, développer l’apprentissage et l’enseignement en alternance, développer l’e-learning et ouvrir les établissements scolaires en dehors des heures de cours.
Eva Joly. La candidate écologiste projette avant tout de créer une allocation d’autonomie pour les jeunes de 18 à 25 ans, afin de « donner un avenir à la jeunesse ». Dans la même veine, elle souhaite réguler et mieux rémunérer les stages. En primaire et secondaire, elle veut recruter et former 20 000 enseignants, mais aussi favoriser les innovations pédagogiques et les activités artistiques et culturelles. Enfin, elle entend réformer la carte scolaire pour assurer la mixité sociale.
Marine Le Pen. La candidate frontiste accorde une grande importance au rôle des parents dans l’éducation. Aussi, elle propose d’accorder un revenu parental, équivalant à 80% du SMIC, pour permettre parents d’avoir réellement la possibilité de choisir entre une activité professionnel ou l’éducation des enfants. Ce revenu serait accessible pendant 3 ans à partir du 2ème enfant. Les allocations familiales, réservées aux familles dont un parent au moins est français, seraient revalorisées et indexées sur le coût de la vie. Par ailleurs, Marine Le Pen veut recentrer l’école sur « la transmission des savoirs fondamentaux » : lire, écrire, compter. Elle compte rendre obligatoire la méthode syllabique en CP, et l’apprentissage de l’histoire de France de façon chronologique et de la géographie française sur cartes tout au long de la scolarité. La candidate d’extrême-droite milite également pour la suppression du collège unique. Elle souhaite aussi redonner son caractère sélectif au baccalauréat en refusant le contrôle continu. Enfin, les filières techniques et manuelles seraient promues, et l’apprentissage à 14 ans rétabli.
Jacques Cheminade. Le candidat de Solidarité & Progrès défend « l’émancipation des individus » et « la formation d’une capacité de jugement indépendante ». De fait, l’école doit selon lui s’articuler tant sur le développement des capacités intellectuelles que sur la formation du caractère et du sentiment. Il compte ainsi former des classes de 15 à 25 personnes maximum et accueillir les enfants dès 2 ans, mais également annuler les suppressions de postes, rétablir les postes de Rased et redonner une formation aux futurs maîtres. Il souhaite par ailleurs repérer les enfants en difficulté dès la maternelle et les intégrer à des classes réduites, des travaux en petits groupes ainsi qu’un tutorat personnalisé. Il souhaite aussi recruter 5000 éducateurs spécialisés et ouvrir des internats pédagogiques pour les jeunes ayant une famille disloquée. Dans l’enseignement supérieur, il compte offrir aux étudiants la possibilité de faire des stages en entreprise. Plus étonnant, le candidat tient à généraliser la pratique du chant choral « pour éveiller la sensibilité et l’écoute ». L’histoire des grandes découvertes scientifiques, l’astrophysique, la préhistoire trouveraient leur place dans les programmes.
Nicolas Dupont-Aignan. D’après le candidat de Debout la République, l’éducation doit devenir une des priorités majeures du prochain quinquennat. Il compte donc augmenter le nombre d’heures consacrées au français dans le cycle élémentaire de 10 à 16 heures (comme en 1969), et dédoubler au maximum les classes de CP pour faciliter l’apprentissage de la lecture. Il déplore dans son programme « la perte d’autorité des professeurs et des instituteurs », et propose donc de réaffirmer l’autorité du conseil de classe pour les décisions de passage ou d’orientation, et de donner le pouvoir à tout professeur de convoquer un conseil de discipline sans avoir besoin de l’aval de l’administration. Par ailleurs, chaque élève perturbateur pourra être exclu d’un établissement et pris en charge dans un « environnement spécialisé ».
Enfin, le souverainiste veut valoriser le métier d’enseignant en mettant fin à la règle du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux, et mieux récompenser les enseignants dans les zones difficiles. Concernant l’enseignement supérieur, il propose de poursuivre l’effort budgétaire qu’il atteigne 2 % du PIB en 2017. Cette augmentation des moyens devra permettre un accès plus démocratique à l’enseignement supérieur par des bourses au mérite et la réduction des frais d’inscription. Enfin, une sélection au mérite serait instaurée à l’entrée de l’université pour les filières qui ont des problèmes de débouchés.
François Hollande. L’une des mesures phares du socialiste consiste à créer 60.000 postes dans l’éducation. En marge, il compte rétablir la formation des enseignants, faciliter l’accueil des enfants de moins de 3 ans et développer l’accès à la culture dès le plus jeune âge. Il compte par ailleurs proposer la création de 150.000 emplois d’avenir pour les jeunes les moins qualifiés, et fixer un objectif de 100.000 jeunes en service civique. Une allocation d’études et de formation serait enfin créée sous condition de ressources.
Jean-Luc Mélenchon. Dans une logique d’égalité, le candidat du Front de gauche propose de rendre la scolarité obligatoire de 3 à 18 ans. Il souhaite également mettre en place des observatoires des inégalités rassemblant élus, parents, professionnels de l’Education et élèves. Comme François Hollande, Jean-Luc Mélenchon compte rétablir tous les postes supprimés dans l’Education et renforcer les postes de conseillers d’orientation et les réseaux d’aides spécialisés aux élèves en difficulté (RASED). Au lycée, les moyens des filières professionnelles seraient augmentés de 50%. Concernant l’enseignement supérieur, le candidat entend abroger la loi sur l’autonomie des universités, afin de « reconstruire un service public ». Et pour sortir des petits boulots pendant les études, les étudiants auraient droit à une allocation d’autonomie.
Philippe Poutou. Le candidat trotskiste propose en premier lieu de ne jamais rémunérer les stagiaires et les apprentis en-dessous du Smic. Par ailleurs, les étudiants bénéficieront d’une allocation d’autonomie à hauteur du Smic, financée comme les retraites par les cotisations sociales. Elle permettra aux jeunes de « ne plus dépendre de leur famille » ou d’accepter des petits boulots. Dans l’enseignement supérieur, le candidat du NPA veut créer des postes « à hauteur des besoins ». Selon lui, il faut également reconnaître le droit de grève pour les lycéens et les étudiants et donner le droit de vote dès 16 ans. Il préconise l’abrogation des réformes LMD, LRU, de la loi Fillon de 2005 et de la masterisation des concours. Il prône également une éducation gratuite de la maternelle à l’université. Concernant l’école primaire et secondaire, Philippe Poutou compte embaucher 150 000 enseignants. L’école serait obligatoire pour tous, avec un tronc comun, de 3 ans à 18 ans.
Nathalie Arthaud. Cette enseignante de métier plaide pour des classes à petits effectifs, qui permettent selon elle de nouer « d’autres rapports de confiance » avec les élèves. La candidate de Lutte ouvrière s’attacherait aussi à mieux prendre en compte les enfants qui ne maîtrisent pas la langue française. Pour cela, elle entend recruter des enseignants, principalement dans les quartiers populaires, et les former correctement. Les postes d’enseignants spécialisés pour l’aide aux enfants en difficulté doivent également être rétablis.