13 avr 2012
Chloé Bossard

Les engagements des candidats : le chômage et l’emploi (2/10)

Le chômage est la deuxième grande préoccupation des Français dans cette campagne, intimement liée à celle du pouvoir d’achat, que nous traitions hier. La majorité des candidats comptent sur les secteurs d’avenir pour créer des emplois, et proposent des contreparties aux entreprises qui embaucheraient des jeunes, des seniors, ou des chômeurs. Mais chacun propose également ses recettes propres.  Le blog NR Présidentielle 2012 en a fait le détail.

(Photo NR)

Eva Joly. La candidate EELV milite pour la création de nouveaux emplois en investissant dans les secteurs d’avenir comme les énergies renouvelables, l’isolation des bâtiments, etc. Elle vise ainsi la création d’un million d’emplois non délocalisables. Elle entend soutenir les TPE-PME et l’économie sociale et solidaire. Elle souhaite aussi accorder un droit de huit années de formation tout au long de la vie. Pour en finir avec les délocalisations, elle entend donner aux salariés un droit de reprise prioritaire sur leur entreprise. Enfin, si elle est élue, Eva Joly lancera une conférence nationale sur la réduction du temps de travail.

Nicolas Sarkozy. Dans la ligne de sa TVA anti-délocalisations, le Président sortant entend jouer sur la compétitivité des entreprises en abaissant leurs charges patronales en échange d’une hausse de TVA. Il veut aussi instaurer un droit à la formation pour tous les chômeurs et l’obligation pour eux d’accepter un emploi qui correspondra à la qualification qu’ils auront acquise. Il prévoit aussi d’exonérer de charges patronales l’embauche des personnes de plus de 55 ans. Il ne reviendra pas sur la défiscalisation des heures supplémentaires. Enfin, il veut rendre obligatoire pour les bénéficiaires du RSA d’effectuer sept heures d’activité d’intérêt général par semaine.

Marine Le Pen. Pour lutter contre le chômage, la frontiste veut mettre en place une protection intelligente aux frontières pour lutter contre la concurrence déloyale des pays à très bas coût de main-d’oeuvre et les délocalisations qui en sont la conséquence. Elle prévoit une administration exclusivement dédiée aux TPE/PME pour simplifier la bureaucratie dont sont victimes nos entrepreneurs. L’apprentissage dès 14 ans sera rétabli. L’État et les administrations auront l’obligation de se fournir auprès des entreprises françaises (grande loi « Achetons français »). Et une embauche sur trois dans la fonction publique sera réservée aux plus de 45 ans. Enfin, Marine Le Pen fait comme toujours le lien entre immigration et chômage. Elle est pour stopper l’immigration et instaurer la priorité nationale, notamment dans les administrations. Des professions seront réservées aux personnes ayant la nationalité française.

Jean-Luc Mélenchon. Outre le retour aux 35 heures, le candidat du Front de gauche veut réaffirmer le CDI à plein temps comme « la norme du contrat de travail ». Pour cela, il préconise d’établir des quotas d’intérimaires, limités à 5% de la masse salariale dans les grandes entreprises, et 10% dans les PME. Jean-Luc Mélenchon entend également interdire les licenciements boursiers, et souhaite faciliter la reprise de l’entreprise par les salariés en cas de délocalisation ou de difficultés financières. Les 800.000 précaires de la fonction publique seraient par ailleurs titularisés. Enfin, la formation professionnelle relevant du service public sera encouragée dans les secteurs porteurs, comme les énergies nouvelles et le ferroutage. Le candidat espère ainsi créer « des millions d’emplois ».

Philippe Poutou. L’interdiction des licenciements est la mesure-phare du candidat anticapitaliste. Pour lui, « il y a largement assez de travail pour tout le monde ». Il envisage donc d’interdire le temps partiel imposé et de réduire le temps de travail à 32 heures hebdomadaires, afin de répartir la masse de travail entre tous les salariés. Le CDI doit en outre devenir la norme, selon son programme. Enfin, le candidat du NPA entend créer un million d’emplois dans les services publics.

Nathalie Arthaud. Pour la candidate de Lutte ouvrière, travailler doit être un « droit élémentaire ». Pour éradiquer le chômage, elle prône une meilleure répartition du travail entre les salariés, avec maintien du salaire. Comme Philippe Poutou, Nathalie Arthaud est partisane de l’interdiction des licenciements, et de la réquisition par l’Etat des entreprises menacées de fermeture. « Il faut puiser dans les profits actuels et passés de la bourgeoisie pour maintenir emplois et salaires », écrit-elle dans son programme. La candidate trotskiste envisage enfin des embauches massives dans les services publics (plusieurs centaines de milliers d’emplois).

Jacques Cheminade. Conjointement à la nomination d’un ministre du Plan et à la mise en place d’une Banque nationale, il veut créer un vrai service public de l’emploi, à la place de l’actuel Pôle Emploi, avec des agents qui accompagnent vraiment et humainement les demandeurs d’emplois. Il entend donner accès à la formation à ceux qui ont le plus besoin d’être réintégrés dans la vie sociale : les jeunes insuffisamment qualifiés, les chômeurs de longue durée, les femmes cherchant un emploi après une maternité, handicapés, prisonniers… et allonger la durée des formations. Il veut concentrer la formation sur des métiers associés aux technologies de pointe qui serviront une économie productive d’avenir et créer un vrai droit à la formation pour tous tout au long d’une vie. Concernant l’emploi des jeunes, Jacques Cheminade compte exonérer de cotisations sociales les entreprises signataires de contrats de plus d’un an avec des jeunes de moins de 25 ans.

François Bayrou. Il prévoit des négociations d’accords-cadres fixant, dans les différentes branches, le cahier des charges de la discussion sur le temps, la durée du travail et l’évolution des salaires. Un contrat de travail unique – le CDI – doit être désormais la règle selon lui. Il entend lui aussi créer un droit effectif à la formation tout au long de la vie, matérialisé par l’ouverture d’un compte formation continue personnel. Selon lui, soutenir la formation professionnelle est un facteur d’accès au premier emploi, de sécurisation des parcours professionnels et de reconversion. Pour cela, il compte remettre à plat les crédits à travers une Agence nationale dont la mission sera de transparence et de stratégie, de mise en ordre du secteur de la formation professionnelle. Il désire également fluidifier le marché de l’emploi en mutualisant davantage les moyens de Pôle emploi, des CCI, des maisons de l’emploi et des missions locales pour capter les emplois en entreprise et notamment dans les TPE et PME. Enfin, les entreprises de moins de 50 salariés qui embauchent un jeune ou un chômeur en CDI seraient exonérées de cotisations sociales.

Nicolas Dupont-Aignan. Le souverainiste entend mettre l’écologie au service de l’emploi par la création de pôles de compétitivité dédiés à l’environnement, des formations universitaires et la mise sur pied d’un grand service public du recyclage et des filières de substitution aux hydrocarbures (énergie, plastique). Il voit dans les DOM-TOM un atout considérable pour les énergies renouvelables. Il souhaite offrir une seconde chance aux jeunes sans formation ou qui se sont trompés de formation grâce à la sécurité professionnelle. Chaque jeune qui sortira tôt du système scolaire disposera d’un «capital-formation» qu’il pourrait utiliser tout au long de sa vie. Il veut également créer à côté du CDD et du CDI un contrat de participation, qui intéressera directement le salarié aux bénéfices de l’entreprise, en contrepartie d’un investissement plus important dans les décisions de la vie de l’entreprise. Les entreprises qui recruteraient un chômeur de longue durée seraient enfin exonérées de cotisations sociales pendant cinq ans.

François Hollande. Plusieurs leviers pour le candidat socialiste. Tout d’abord les 500.000 « contrats de génération » qu’il veut mettre en place feraient que tout employeur qui embauche un jeune en CDI et maintient un senior dans l’entreprise ne paiera plus de cotisations sociales sur les deux emplois. Il veut aussi créer 150.000 emplois d’avenir pour les jeunes les moins qualifiés. Le million de logement qui bénéficierait de travaux d’isolation thermique sera aussi un gisement d’emploi. En parallèle, il souhaite engager avec les grandes entreprises françaises un mouvement de relocalisation de leurs usines dans le cadre d’un contrat spécifique ; il augmentera aussi les cotisations chômage sur les entreprises qui abusent des emplois précaires.

2 Comments

  • La question du travail et de l’emploi interroge les Français.
    In fine, chacun sans doute le ressent, il y a des candidats qui expriment bien leur questionnement sur le sujet et qui s’interrogent sur le fond même du problème pour tenter de nous apporter des solutions efficaces : comment les emplois vont-ils évoluer au XXI siècle ? Quid de cette masse globale de travail et de son niveau technologique et intellectuel ? Comment les citoyens sont-ils formés et de quels atouts professionnels la société républicaine doit-elle les doter ? Quelle(s) forme(s) doit prendre la défense de l’emploi en France tant sur les plans économique, administratif que politique voire philosophique ?
    Bref, certains candidats posent quasi-ouvertement la question d’un choix de société. Et en ce sens, probablement avec une certaine pertinence tant les évolutions techniques ( utilisation d’internet avec travail à domicile etc. ), sociétales ( coût de l’énergie avec transport voire avec avec modes de productifs, etc. ) et naturelles ( réchauffement de la planète avec pollution atmosphérique et situation des usines et de l’habitat etc. ) pour nous limiter à quelques unes des plus connues, nous sont promises à de profondes mutations voire à de réels bouleversements.
    D’autres candidat paraissent plus pragmatiques dans leurs réponses.
    Pour intéressantes et même pertinentes qu’elles puissent d’ailleurs être, le reproche qui pourrait leur être fait est justement qu’elles n’amènent pas suffisamment – du moins à mes yeux – le citoyen à s’interroger afin qu’il puisse mieux juger de leur intérêt réel. Ceci ne préjuge cependant pas de la capacité de leurs auteurs à donner des explications si les citoyens et/ou les corps intermédiaires les sollicitaient. On aurait toutefois aimé et d’ores et déjà que ces candidats-la s’expliquent plus en détails.
    Enfin, il y a ceux qui semblent au moins à première écoute et/ou lecture, « expédier » des réponses, leurs réponses souvent d’un classicisme absolu; bref, des quasi-recettes toutes faites.
    Dommage car parmi les missions républicaines de l’élu et même si la règle n’est pas formalisée, l’éducation citoyenne, l’éducation civique pour tous doit tenir une belle place. C’est en démocratie politique très probablement une question de considération du mandataire pour ses mandants.
    La dimension « Travail » est d’ailleurs telle dans notre société , qu’il s’agit sans doute aujourd’hui d’apporter bien plus que des réponses techniques même si celles-ci sont naturellement indispensables.
    Affirmer le caractère intergénérationnel du travail, de l’emploi, n’est-il qu’un véritable questionnement ou une indispensable réponse utile pour conserver les équilibres de la Société ? Se préoccuper de la manière dont on doit protéger l’emploi ne détermine-t-il pas la manière dont on appréhende l’être humain, l’homme, la femme voire les plus jeunes -mineurs aux yeux de la loi – et quelquefois aussi bien tristement les enfants au travail.
    La question n’est pas uniquement celle du travail dans l’hexagone ou en Europe, mais bien aussi la question du travail dans le monde. Si le travailleur avec un grand T, salarié mais pas moins libéral ou indépendant ( commerçant, artisan …) bénéficie d’une juste protection, d’une juste rémunération, d’un juste droit à l’expression partout sur la planète, il est clair que les rééquilibrages entre zones développées et zones en cours de développement s’opéreront plus facilement. Et que l’on ne nous parle pas d’utopie : les chefs d’état notamment parmi les plus puissants (G8, G20 ), les organisations internationales ( OMC , CNUCED etc… ) s’interrogent et adaptent les règles qui doivent régir le commerce, le développement économique ou les établissements financiers de la planète. Pourquoi ensemble ne pousseraient-ils pas plus loin le travail déjà accompli dans ces organisations ou encore d’autres (OIT … ) sur cette question du travail et de l’emploi. L’UE elle-même dans son traité de Lisbonne n’avait-elle pas par exemple tracé des principes pour le futur sur la qualité des emplois en son sein ? Si.
    Pour importante que soit la question d’une saine concurrence dans la mesure seulement où elle constitue une réelle stimulation pour les êtres humains et renforce leur collaboration, ne devrait cependant pas et à l’évidence se transformer en outil de destruction de nos sociétés et des êtres humains qui les composent, ou alors c’est à ne rien comprendre de l’objectif à assigner à nos organisations humaines.
    Bref, si le travail est bien un moyen pour chacun d’assurer sa subsistance et pour chaque homme et femme de pouvoir contribuer à son épanouissement, ne convient-il pas de poser en contrepoint des limites juridiques aux dérives qui lui sont associées; et notamment la recherche excessive du lucre ( cf. par exemple fraude et évasion fiscales estimée annuellement en France,excusez du peu (!) entre 50 et 120 milliards d’euros … ! ) et l’abus de pouvoir ( cf par exemple harcèlement moral et professionnel, non respect des dispositions du code du travail ).
    Et puis si les mots ont un sens, ou si l’on préfère si le lobbying et la culture ( qui domine tout ) en ont aussi un, qu’il nous soit également permis es qualité de citoyen de nous interroger sur l’utilisation d’expressions ( d’accord ou pas d’accord d’ailleurs avec elles) par l’un ou l’autre des candidats comme « charges sociales » plutôt que « cotisations sociales », « contrat de génération », « service public de l’emploi », « l’apprentissage dès 14 ans », les « licenciements boursiers » ou un « droit de formation tout au long de la vie » etc. N’oublions jamais que le « non-dit » est toujours aussi important que le « dit ».
    Bref, l’emploi étant un des piliers de la stabilité sociale, et par conséquent du bonheur de vivre et même de vivre ensemble, examinons avec la plus grande attention ces propositions en matière d’emploi, car ne doutons pas qu’elles conditionnent au moins pour partie notre avenir commun. Et comme il est, dit-on, essentiel pour bien imaginer l’avenir de bien comprendre le passé regardons également les bilans des uns et des autres.
    Les animateurs du présent blog ne pourraient-ils à cet égard et comme ils le font avec la présente série d’articles dont nous pouvons réellement leur savoir gré nous dresser un tableau de l’évolution de l’emploi et du chômage gouvernement par gouvernement, mandat présidentiel par mandat présidentiel, au cours de cette cinquième république avec bien sûr les éléments de compréhension utiles ? Rien ne les empêchant en sus de montrer pour chacun des candidats « à charge » comme « à décharge », la portée possible aussi bien sur les plans économique que social, de leurs propositions. L’électeur je n’en doute pas en serait mieux éclairé et par nature serait encore mieux à même d’exprimer son vote.

    • La proposition soulevée ne manque pas d’intérêt, et nous essaieront de nous y pencher. Mais il s’agit d’un travail de très longue haleine qui doit être fait avec précision. Un peu de patience !

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