19 mar 2012
Chloé Bossard

A la Bastille, Jean-Luc Mélenchon joue avec les symboles

Cette marche citoyenne se voulait LE grand temps fort de la campagne mélenchonienne. Jackpot. Alors que le Front de Gauche attendait 30.000 militants, ce sont en réalité plus de 120.000 sympathisants qui sont venus gonfler le cortège de la place de la Nation à la place de la Bastille, hier à Paris.

Il faut dire que l’équipe de campagne avait mis le paquet, usant de symboles révolutionnaires à tire larigot. A commencer par la date : le 18 mars marque le début de la Commune de Paris, en 1871. Le lieu ensuite : Jean-Luc Mélenchon appelait le peuple à « reprendre la Bastille », emblême de la Révolution française et de l’avènement de la République.

Les manifestants venus le soutenir ont compris le message. Le cortège, teinté de rouge, arborait des bonnets phrygiens, et des pancartes « Vive la VIe République ! » Les six millions de tracts distribués par les 900 bénévoles recrutés pour l’occasion appelaient à « l’insurrection civile », à la « révolution citoyenne » et à « prendre le pouvoir ». Tout le long de la rue Saint-Antoine, les cris « Résistance, résistance ! » ponctuaient le trajet.

Aux côtés des militants du PCF, les ouvriers des principales usines en difficulté étaient aux premières loges. Symboles d’une industrie sacrifiée, les Fralib ont ouvert la marche, hissant bien haut l’éléphant en carton, logo de la marque Lipton, confectionné pour l’occasion. Quant aux employés de Petroplus, ils ont largué des dizaines de faux billets de banque portant des messages de colère. ArcelorMittal et Sernam étaient également au rendez-vous.

L’arrivée sur la place de la Bastille aurait pu inspirer un tableau à Eugène Delacroix. Des dizaines de militants avaient pris d’assaut la colonne de Juillet, au centre de la place. « Mélenchon, enfant des Lumières, le peuple est avec toi », pouvait-on lire sur l’une des banderoles déployées en hauteur. Un héritage clairement assumé.

Avant l’apparition de leur champion sur la scène montée pour l’occasion devant l’Opéra Bastille, les sympathisants ont vu défiler des artistes venus en soutien. Alee, la Chanson du dimanche et H&K se sont succédés, ainsi que l’humoriste Didier Porte. Jusqu’au chanteur Ridan, bonnet phrygien sur la tête, célèbre pour son engagement politique qui lui a valu bien des déboires auprès des maisons de disques.

L’arrivée sur scène du candidat, cravate rouge et rose rouge sur la poitrine, a marqué le clou de la journée. « Mais où on était disparu tout ce temps ? Nous voici de retour, le peuple des révolutions et des rebellions en France ! », a-t-il commencé, suscitant l’acclamation de la foule. « Mettez à la mode la couleur rouge, prenez les places et les rues de la République comme vous le pouvez dans toutes les villes et villages de France », a-t-il scandé à la manière de Georges Marchais. « Président, président ! », a aussitôt répondu la masse des militants.

Car c’est bien la force de Jean-Luc Mélenchon. Il réussit le difficile mélange entre l’internationalisme communiste, et des valeurs profondément républicaines. Quel autre ancien socialiste peut se targuer de chanter à la fois l’Internationale et la Marseillaise à la fin de chaque meeting, main dans la main avec les responsables communistes Marie-George Buffet et Pierre Laurent ? Pour sûr, l’amalgame plaît, puisque l’engouement autour du candidat de cesse de prendre de l’ampleur. Crédité de 10% dans les sondages, Jean-Luc Mélenchon aura au moins créé la surprise lors de cette campagne.

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