24 fév 2012
mariellaesvant

La vache et les (aspirants) présidents

« Ce n’est pas en tapant sur le cul des vaches qu’on défend l’agriculture ». José Bové a sûrement raison. Mais pour moissonner les voix, ça peut être payant. Pour préparer leur défilé – Sarkozy samedi, Bayrou, dimanche, François Hollande mardi, Jean-Luc Mélenchon mercredi, Eva Joly jeudi et Marine Le Pen vendredi – les candidats polissent leurs bottes. Et font pain sec. Parce que dans la plus grande ferme de France, il ne suffit pas de carresser les bovins. Il faut aussi flatter les éleveurs. Et goûter quelques dizaines de spécialités. En la matière, Jacques Chirac était une bête de concours (sans mauvais jeu de mot). Cette année, il déclare forfait pour « raisons personnelles ». Mais même en l’absence du « chouchou », ces 8% de l’électorat est toujours acquis à la droite, selon une étude du Cevipof. Et penche de plus en plus vers l’extrême.

 

 

Le successeur de Chirac a bien failli se fâcher à vie avec le monde agricole. A peine élu, Nicolas Sarkozy avait fait trembler les piliers du modèle « intensif » avec son Grenelle de l’environnement. Sans trop de dommages pour les moissonneurs de l’extrême, au final. Et puis trois ans plus tard, grosse boulette. Dans les allées de « la plus grande ferme de France », et pas seulement, tout le monde se souvient de la délicatesse du président-désormais-candidat en 2008. Un splendide « Casse toi pov’con » capté par une caméra volante.

 

 

Un an plus tard, Nicolas Sarkozy revient, sous haute surveillance. Sa garde rapprochée dresse un cordon sanitaire autour de lui, public et éleveurs sont privé de serrage de paluche, des badauds écartés pour délit de « gueule d’opposant« , et le journalistes triés sur le volet. On est loin du bain de foule d’un Chirac à la paluche ouverte et à la bouche ruminante.  Deux ans plus tard, il fait l’impasse sur l’inauguration, et tente un autre type d’esquive… Il débarque une heure avant l’heure prévue, histoire d’éviter les mécontents qui l’attendent de pieds ferme. Mais les agriculteurs sont coriaces, et il récolte un gros bouquet de huées. Un an plus tard, il se la joue Chirac (le pot de rillette en moins) en déambulant 4 heures dans les allées. C’est que la présidentielle approche. Et puis, après avoir décidé que ‘ »l’écologie, ça suffit », le président était sûr de s’être fait quelques amis du côté des adhérents de la FNSEA.

Un pied dans la gadoue normande, l’autre sur la terre de Corrèze, François Hollande a fait son baptême de paille électorale jeudi en Mayenne. Il a semé les premières lignes de son programme pour l’agriculture, qu’il détaillera mardi au Salon… où il a prévue une visite de « 7 heures ». Autant à gratouiller le ventre des agneaux – comme Lionel Jospin en 2002 ou Ségolène Royal en 2007. Il y a un an tout juste, il digérait une rencontre avec DSK, et discourait sur une possible (et même probable) candidature. « C’est bien qu’on y soit, c’est même nécessaire, mais ce n’est pas un lieu où on vient chercher des voix« , essayait de faire croire le pas-encore-candidat devant le regard incrédule d’un « cul noir », sympathique représentant des porcelets limousins. En tous cas, ce n’est pas un lieu où on minaude avec la nourriture. Sept heures sur place, c’est son régime Dukan qui tombe à l’eau…


François Hollande au salon de l’agriculture par LEXPRESS
L’éleveur du Béarn est en général plutôt à l’aise au milieu des bestiaux. Et ils le lui rendent bien. François Bayrou, ex- « Monsieur 20% » avait fait un passage remarqué en 2007. Cinq ans après, le candidat du Modem, qui sera dimanche au Salon, a toujours la côte chez les agriculteurs. Pas loin de 19%, selon le dernier baromètre BVA… Derrière Nicolas Sarkozy (35%) et Marine Le Pen (21%).  Cette dernière, qui avait fait son premier défilé de présidente du Front national en 2011 – trois heures qui fleurait bon le terroir, en bras de chemise à boire de la bière et du vin blanc – a un peu echauffé les esprits en ouvrant le débat sur la viande Halal. Elle fera tout de même mieux que la gauche (François Hollande est crédité de 11% d’intention de vote) et que les écologistes, dont les agriculteurs se méfient (défient) toujours autant.

 

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