10 fév 2012
Chloé Bossard

Quid du temps de parole ?

Le temps de parole est un sujet de litige lors de chaque élection. Règles trop complexe pour les médias, pas assez d’égalité pour les candidats… le Conseil supérieur de l’audiovisuel, qui effectue les contrôles, a cette année encore du fil à retordre.

Lundi, les dirigeants de neuf chaînes de télévision et de radio (RTL, France Inter, France Bleu, France Info, France Culture, Europe 1, RMC, BFM Business et BFM TV) ont réclamé un assouplissement des règles de stricte égalité du temps de parole à Jean-Louis Debré, président du Conseil Constitutionnel. « Cette situation n’existe pas chez nos grands partenaires européens qui ne sont pas moins démocratiques que la France, pas plus qu’elle ne concerne ni la presse, ni Internet, pourtant des vecteurs tout aussi importants d’information que l’audiovisuel », écrivent les patrons dans une lettre.

Le CSA contrôle les temps de parole en direct.

En face, les petits candidats se plaignent de ne pas être suffisamment représentés, au profit de François Hollande et Nicolas Sarkozy qui monopolisent écrans et bande FM. Mercredi, un conseiller de Jean-Luc Mélenchon a directement écrit à Christine Kelly, présidente du groupe de travail sur le pluralisme et la campagne électorale au CSA. « C’est simple : on a souvent l’impression à l’écoute de nos médias audio-visuels que l’élection présidentielle ne comporte qu’un tour, le 2ème, dont par ailleurs ils ont déjà fixé le casting », écrit-il. « Si le 19 mars, soit dans seulement 40 jours, la répartition des temps de parole n’a pas nettement évolué on pourra, sans craindre l’exagération, dire que la campagne aura été faussée« . Face à cette situation, le Front de Gauche demande au CSA « d’intervenir sans tarder ».

De son côté, l’intéressée assure que le CSA est en discussion permanente avec les chaînes, et qu’il effectue des contrôles réguliers. « On est vraiment main dans la main avec les chaînes pendant toute cette période, pour qu’il ne puisse pas y avoir de dérapage », explique Christine Kelly sur le site du Conseil.

Christine Kelly dirige le pôle pluralisme.

Du 1er au 27 janvier, François Hollande  et Nicolas Sarkozy ont occupé 73% du temps de parole sur les télévisions, et 75% sur les radios. Les petits candidats, eux, sont presque oubliés des journaux et magazines d’information. En janvier, TF1 a consacré… 0% de son temps d’antenne à Hervé Morin et Frédéric Nihous.  C’est à dire à peu près leur score dans les sondages, le décompte peut donc paraître équitable.

Mais selon les chaînes, les contrôles du CSA peuvent donner des résultats surprenants. On y apprend notamment que Marine Le Pen a occupé plus de 56% du temps d’antenne des candidats sur M6. Quant à Jean-Luc Mélenchon, il varie de 2,77% sur TF1 à 18% sur France 2. Cet écart est en grande partie dûe à son intervention dans l’émission « Des Paroles et des actes » le 12 janvier sur la deuxième chaîne. Même constat pour François Bayrou, à qui BFM ne consacre que 5,88% de son temps quand il occupe 13% sur France Inter.

En réalité, la campagne est divisée en trois périodes distinctes, pour lesquelles les règles sont différentes :

  • Depuis le 1er janvier et jusqu’au 19 mars, le CSA applique le principe d’équité pour le temps de parole et le temps d’antenne. Les apparitions médiatiques sont donc calculées en fonction de la représentativité du candidat dans les sondages, lors des dernières élections, et de la dynamique de campagne. « Plus un candidat anime sa campagne, plus il sera représenté », résume Christine Kelly.
  • Du 20 mars au 9 avril, entre le dépot des parrainages et la publication de la liste des candidats au journal officiel, l’équité prévaut pour le temps d’antenne, c’est à dire l’ensemble du temps consacré à un candidat et à ses soutiens. En revanche, les chaînes doivent appliquer l’égalité pour le temps de parole, c’est à dire le temps où le candidat ou ses soutiens s’expriment directement.
  • Du 10 avril au 6 mai, lors de la campagne officielle, les médias doivent respecter l’égalité du temps de parole et du temps d’antenne.

Le cas Sarkozy, enfin, est un véritable casse-tête. Doit-il être considéré comme candidat ou comme président ? Ca dépend de son discours. Ses interventions sont compabilisées dans le temps de parole si elles dressent un bilan de l’action passée, si elles exposent les éléments d’un programme, ou si elles excèdent le champ de ses fonctions officielles.

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