Les petits Mickeys ne craignent pas la crise



Avec 5.327 “ livres de bandes dessinées ” publiés en 2011 (+3,04%) le neuvième art démontre sa bonne santé persistante.

Il y a eu 455 manifestations autour de la BD en 2011 dont BD Boum à Blois. (Photo NR/Jérôme Dutac)

Depuis seize ans, Gilles Ratier, le Limougeaud, inamovible secrétaire général de l’ACBD (Association des critiques et des journalistes de bande dessinée) décortique la production de bandes dessinées de l’année pour en tirer un rapport devenu, aujourd’hui, un élément incontournable de la vie du neuvième art.

Que dit l’ami Gilles dans les trente-deux pages de son rapport 2011. Que la bande dessinée va bien, merci. Les petits Mickeys gambadent gaiement, à peine touchés par la morosité économique ambiante. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Un océan de BD : 5.327 titres sortis dont 3.841 nouveautés et à l’intérieur de ces nouveautés, 1.577 véritables créations.

Les “ vieux ” héros valeurs sûres

Gilles Ratier, le secrétaire général de l'ACBD est également le rédacteur en chef du site généraliste BDzoom. (photo © Peggy Siméonin-Ratier)

Quel bédévore (même argenté) peut absorber une telle littérature ? Gilles Ratier classe ces nouveautés en quatre lectorats : les séries asiatiques (mangas et compagnie c’est-à-dire près de 40 % de la production) ; les BD franco-belges (l’essentiel du marché avec 42,50 % des titres) ; les comics et les romans graphiques se partagent les miettes.

À propos de miettes, le marché de la BD (qui ne représente – après tout – que 8,32 % de la production de livres en France) est partagé entre quatre grandes maisons, onze entreprises moyennes et une flopée de petits éditeurs qui ont pourtant sorti 1.675 titres en 2011. Les « gros » se nomment Guy Delcourt (qui a acquis les éditions Soleil), Média-Participations (c’est-à-dire Dargaud, Dupuis, Le Lombard), Jacques Glénat et Flammarion (c’est-à-dire Casterman et Fluide Glacial).

Ces poids lourds jouent la prudence et Gilles Ratier insiste sur la mise en avant des valeurs sûres, des séries et des héros connus et archi-connus qui réalisent l’essentiel d’un chiffre d’affaires stable cette année. Une centaine de titres ont ainsi atteint ou dépassé les 50.000 exemplaires (lire le top Ten ci-dessous). Pas de super-star pour tirer les ventes (pas d’Astérix, pas de Titeuf, pas de Largo Winch, par exemple) alors que du côté des mangas, l’inusable Naruto a vu chacun des trois tomes parus en 2011 partir à 250.000 exemplaires devant des séries japonaises comme One Piece, Fairy Tail ou le « vieux » Dragon Ball. Côté valeurs sûres encore, le secteur patrimonial est en pleine expansion avec des reprises d’album qui explosent : Tintin, Gaston, Tom-Tom et Nana, Boule et Bill restent chers au cœur des lecteurs. Qu’ils aient 7 ou 77 ans !

le top ten

Voici le classement effectué par Gilles Ratier d’après les chiffres communiqués par les maisons d’édition.

  • N° 1 XIII (Sente et Jigounov/ Ed. Dargaud) d’après Van Hamm et Vance : 500.000 exemplaires.
  • N° 2 Kid Paddle (Midam/ Ed. Dupuis) : 360.000 exemplaires.
  • N° 3 Boule et Bill (Laurent Verron / Ed. Dupuis) d’après Jean Roba : 253.000 exemplaires.
  • Suivent : Thorgal (Sente et Rosinski/ Ed. Dargaud) 220.000 ex. ; Les Aventures de Kid Lucky (Achdé /Ed. Marsu Productions) 220.000 ex. ; XIII Mystery (tome 4/Colonel Amos par Alcante et Boucq/ Ed. Dargaud) 200.000 ex. ; Cédric (Cauvin et Laudec / Ed. Dupuis) 170.000 ex. ; Les Légendaires (Sobral/ Ed. Delcourt) 170.000 ex. ; Lanfeust Odyssey (Arleston et Tarquin / Ed. Soleil) 160.000 ex. ; Les Nombrils (Dubuc et Delaf / Ed. Dupuis) 160.000 ex.
  • A noter que l’adaptation dessinée des Simpson (4 BD, 3 hors-série) totalise 1.080.000 exemplaires, record de l’année !

L’impact des blogs

Dans son passionant rapport, Gilles Ratier s’est intéressé aux différents blogs de bande dessinée. Voici l’intégralité du chapitre consacré à ce support intéressant plus particulièrement la rédaction de Case Départ:

« Grâce aux blogs BD, où des auteurs, professionnels ou amateurs, proposent en ligne leurs travaux, la création est aussi toujours bien représentée sur Internet. Plus ou moins graphiquement développés, ils associent, la plupart du temps, commentaires et dessins. Bien qu’aucune statistique officielle ne soit disponible, on peut quand même constater, en consultant les annuaires des deux principaux hébergeurs de blogs en France, que 7 825 blogs sont classés blogs BD chez Overblog (contre 6 021 en 2010) et 5 454 chez Canal Blog (contre 4 268 l’année dernière) : des chiffres surestimés car ils englobent les blogs de critiques BD. De plus, la plupart des auteurs investissent dans un hébergement privé avec des plates-formes internationales, telles que Dotclear et WordPress. On peut néanmoins connaître ceux qui ont le plus de succès, en termes de consultation par mois et de nombre de liens pointant vers eux : d’après le classement Ebuzzing (anciennement Wikio), les 3 premiers blogs BD en novembre 2011 étaient l’Actu en patate de Martin Vidberg (il arrive en 40e position dans le classement Ebuzzing tous blogs confondus, un succès qui tient surtout à sa collaboration avec le journal Le Monde), Un crayon dans le cœur de Laurel, et le blog communautaire 30 jours de BD. L’année 2011 confirme que les blogs sont aussi un vivier pour la publication d’œuvres papier. Signes des temps pour la reconnaissance des créations sur les blogs, l’entrée chez Delcourt, en tant que directeur de publication, de Yannick Lejeune, ingénieur informaticien et organisateur du Festiblog, et publication, chez Dupuis, de la bdnovela Les Autres Gens… Le blog BD est même devenu un genre à part entière dans la bande dessinée !« 

> L’intégralité du rapport 2011 de Gilles Ratier  est disponible sur le site de l’ACBD.

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À propos de Erwann Tancé

C’est à Angoulême qu’Erwann Tancé a bu un peu trop de potion magique. Co-créateur de l’Association des critiques de Bandes dessinées (ACBD), il a écrit notamment Le Grand Vingtième (avec Gilles Ratier et Christian Tua, édité par la Charente Libre) et Toonder, l’enchanteur au quotidien (avec Alain Beyrand, éditions La Nouvelle République – épuisé).
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