Matricule : « les policiers sont déjà assez surveillés »



Les syndicats de policiers réfutent la réalité des contrôles d’identité au faciès. S’ils ne sont pas complètement opposés au retour du numéro d’identification sur leurs uniformes, comme le préconise le gouvernement (promesse 30, lire en bas de page), ils rejettent en bloc l’instauration d’un récépissé proposé par les associations.

Philipe Capon, président d'Unsa Police, plaide pour la mise en place de caméras portatives.

Philippe Capon, secrétaire national d’Unsa Police, plaide pour la mise en place de caméras portatives.

Dans certaines cités, les blacks, beurs, barbus ou simples jeunes en jogging et casquette doivent sortir leur carte d’identité devant les policiers parfois plusieurs fois par jour. Les associations dénoncent ces « contrôles au faciès ». Mais, malgré des dizaines de récits du même genre, les syndicats de policiers réfutent toujours la réalité de ces contrôles abusifs.

« Il est vrai de nombreux contrôles sont effectués dans certains endroits où la population est principalement d’origine étrangère. On n’a pas d’autre choix« , défend Philippe Capon, secrétaire national d’Unsa Police. « En aucun cas un policier ne se lève le matin en se disant qu’il va contrôler telle personne », abonde Bruno Berger, président d’Alliance Police nationale.

Tous deux pointent la politique du chiffre, en vigueur sous la présidence de Nicolas Sarkozy. « Quand on vous demande de contrôler tant d’étrangers par semaine, vous allez forcément avoir tendance à cibler certains types de personnes », explique Philippe Capon. Des pratiques dénoncées par les associations anti-racistes. « Au prétexte de lutter contre le trafic des stupéfiants, les policiers se mettent aux pieds des barres pour essayer de choper des gamins avec des boulettes dans la poche« , assure Munia Ewanjé Epée Boggio, du collectif antiracisme D’ailleurs nous sommes d’ici 37.

On n’a pas besoin de récépissé pour respecter les règles !

Pourtant, dans son dernier rapport, le défenseur des droits, Dominique Baudis reconnaît la réalité de ces contrôles abusifs. Pour y faire face, il propose un retour au matricule, ce numéro apposé sur l’uniforme des policiers, permettant de les identifier. Cette option, plébiscitée par le ministre de l’Intérieur Manuel Valls, est aussi rejetée en bloc par le collectif Stop le contrôle au faciès. L’association réclame l’instauration d’un récépissé, qui serait conservé par la personne contrôlée.

« On n’a pas besoin de récépissé pour respecter les règles ! » répond Philippe Capon, selon qui le collectif est « enfermé dans un stéréotype« . Le syndicaliste dénonce le poids d’une tâche administrative supplémentaire, qui prendrait trop de temps aux policiers sur le terrain. « On est déjà super surveillés », renchérit son collègue d’Alliance Police nationale, pour qui « on se trompe de cible. Ce sont les trafiquants qu’il faut surveiller ».

Quant au matricule, Philippe Capon ne s’y oppose pas sur le fond. Sur la forme, les policiers ne doivent pas « se sentir montrés du doigt ». L’Unsa Police réclame donc que la mesure s’applique à l’ensemble des forces de sécurité – police, gendarmerie, polices municipales, douanes… -, et qu’il soit accompagné de caméras portables, déjà expérimentées sur certaines zones sensibles. Une fausse solution pour Munia Ewanjé Epée Boggio, car « les policiers peuvent aussi choisir de ne plus filmer quand ça devient chaud ». Le ministre n’a pas encore complètement tranché.

Lire aussi : Noirs, arabes ou barbus : « Vos papiers ! »

 

La promesse

 

Les déclarations de campagne

« Le contrôle au faciès est une discrimination de la vie quotidienne, une injustice que je n’accepte pas. Je veux y mettre un terme car chaque citoyen mérite la même considération, le même respect », déclarait le candidat Hollande aux médias en avril 2012.

 

L’action

Jean-Marc Ayrault a annoncé en juin la mise en place d’un récépissé à remplir par les forces de l’ordre lors de chaque contrôle d’identité, une mesure réclamée par les associations. Le Premier ministre promettait l’adoption rapide d’une loi pour entériner le dispositif.

C’était sans compter sur les velléités du ministre de l’Intérieur. Le 18 janvier, Manuel Valls a purement et simplement enterré le récépissé, auquel étaient opposés les syndicats de police. Il propose le retour d’un numéro d’identification sur l’uniforme des policiers, qui pourraient ainsi être clairement identifiés.

Un nouveau code de déontologie a également été rédigé, et sera rendu public en avril. Il proscrit le tutoiement lors des contrôles d’identité et règlemente pour la première fois les palpations, qui devront être pratiquées à l’abri des regards et uniquement en cas de menace pour la sécurité des policiers.

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