ENQUÊTE : Quand l’entreprise se met à l’œuvre…
Culture. Peinture. Sculpture. L’art et l’entreprise se rencontrent très régulièrement pour le plus grand bonheur des artistes et des salariés.
L’artiste peintre franco-américaine Gwenn Seemel disait : « Il y a autant de définitions de l’art qu’il y a d’artistes et d’amateurs d’art dans le monde, mais il existe une définition à l’origine de toutes les autres. L’art provoque toujours un changement, petit ou grand, personnel ou universel. C’est sa valeur, sa raison d’être, son but et sa définition complète… ». Aussi, quand un sculpteur, un peintre ou un photographe franchit le seuil de l’entreprise pour y faire naître ses créations, un grand chambardement se prépare. « Deux univers se rapprochent et dialoguent au service d’une coproduction originale » résume Patrick Findeling. Le président de Touraine Mécénat Entreprises avait accueilli à Plastivaloire Florent Lamouroux avec l’idée de jouer avec la matière plastique et des blouses en tissu. Le personnel s’était passionné par l’expérience.
Des banques, des cabinets d’experts comptables, des laboratoires pharmaceutiques, des grands magasins, des hôpitaux ou cliniques se mobilisent ou se sont mobilisés pour accueillir un jour une résidence d’artistes à travers cette association un peu unique en son genre. Avoir pour mission de travailler sur la communication est, par exemple, un réel défi. Questionner les relations entre art contemporain et espace public en est un autre. Aux interrogations de départ succède l’inspiration. « Il faut bien trouver un début » sourit Alain Quesnel qui travailla une installation chez RCP Design Global à Tours. L’entreprise l’avait interrogé alors sur le sens de son travail jugé très « chinois ». « Avec la Chine, on perd son latin même si aujourd’hui, Paris ou Pékin, c’est du pareil au même… » avvait-il précisé.
À l’imprimerie Graphival désormais installée à Joué-lès-Tours, Ma Zhong Yi s’était lâché en 2012. Par sa double culture franco chinoise, il a mélangé le mot et l’image, à l’instar des idéogrammes asiatiques qui recèlent cette double nature. Par un contact individuel avec l’ensemble des collaborateurs, il en a fait des personnages qui peuvent communiquer entre eux à un autre niveau que celui strictement professionnel. Conséquences : plus de convivialité, des tensions qui s’apaisent, une découverte mutuelle et plus personnelle des salariés entre eux. Un pari réussi !
Exprimer les valeurs d’humanisme de l’entreprise
L’art peut donc libérer les pratiques et les actes. C’est ce que vient dire à Tours Christian Monjou, grand témoin de cette enquête et invité du réseau Carnet Pro : « N’être qu’un manager, ça lasse… Il faut marcher au milieu des gens pour les emmener quelque part, leur donner envie de changer… ». Pour l’entreprise, c’est la meilleure des façons d’exprimer des valeurs d’humanisme. Et pour l’artiste, venir dans une entreprise, c’est aussi le moyen de remettre en question ses pratiques et de libérer son imagination hors de la solitude de l’atelier. Certains saisissent aussi l’occasion de profiter d’un mécénat d’entreprise pour collaborer à des œuvres uniques. À travers cette démarche, la célèbre faïencerie Henriot de Quimper ouvre ses portes depuis quelques années à des peintres et des sculpteurs.
Placer le redressement créatif au service du redressement productif : tel est le cheval de bataille du ministère de la culture et de la communication. L’État a inauguré, en octobre dernier, l’opération « L’entreprise à l’œuvre », visant à déployer des mini-expositions de grandes collections nationales dans l’hexagone. Objectif, favoriser l’accès des salariés à l’art sous des formes multiples : revisiter le packaging d’un produit destiné à l’international, exposer des œuvres, concevoir des supports publicitaires sur des matériaux originaux ; fédérer les salariés. Cette initiative rejoint non seulement la philosophie des résidences d’artistes mais aussi la raison d’être de l’Artothèque du Centre Val-de-Loire basée à Saint-Avertin. Créée en 2000 par le galeriste tourangeau Gérard Leduc, l’association offre une large palette d’œuvres picturales destinées à la location, pour le particulier, la collectivité locale ou l’entreprise. Les artistes prêtent et participent à différentes activités. Reconnue d’intérêt général, elle ne dispose malheureusement d’aucune subvention publique et se cherche une meilleure visibilité.
Mot de fin au président de Touraine Mécénat Entreprise, Patrick Findeling : « L’art en entreprise, c’est l’occasion de réaffirmer l’importance de la vie culturelle et de la culture comme vecteur de lien social en nous apportant cette part de rêve, d’immatériel, de pensée et de nouveaux cheminements qui nous font parfois tant défaut au quotidien ! ».