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9782080285935

 

Véronique Ovaldé est de retour et autant dire que cela illumine cette rentrée littéraire ! Cette jeune quinquagénaire a publié son premier roman en 2000, intitulé Le sommeil des poissons.

Au fur et à mesure de la parution de ses romans, l’écrivaine se fera remarquer dans l’univers littéraire. En 2009, elle recevra trois prix :  le prix Renaudot des lycéens, le prix France Télévisions et le grand prix des lectrices de Elle pour Ce que je sais de Vera Candida, son septième roman.

Véronique Ovaldé, également éditrice, écrit aussi pour la littérature jeunesse.

Drame un soir de carnaval

L’histoire de ce 29e opus intitulé Fille en colère sur un banc de pierre ? Elle nous mène sur l’île d’Iazza, au large de Palerme. C’est là que vivent les Salvatore : un père tyrannique et ombrageux, Salvatore ; une mère effacée, Sylvia et leurs quatre filles qui, toutes, portent le prénom d’une héroïne d’opéra, la passion de leur père. Il y a donc Violetta la reine, Gilda la pragmatique, Aïda la préférée et Mimi le colibri.

Les deux plus petites, Aïda et Mimi, sont inséparables. Tandis que le père aime à créer des différences entre ses filles. Un soir de carnaval, Mimi, qui n’a encore que 6 ans, disparaît. Elle ne sera jamais retrouvée. Aïda l’accompagnait. Leur père va la considérer comme responsable. Au point qu’Aïda finira par quitter l’île pour vivre à Palerme. Elle n’est encore qu’une adolescente.  Elle a été ostracisée. Et s’est construit une vie. Entre petits boulots, ouvrages de vulgarisation scientifique et rencontres fugaces.

Quinze ans se sont écoulés quand l’une de ses soeurs l’appelle. Leur père vient de mourir. Aïda décide de rejoindre la maison familiale et ses souvenirs. Elle en profitera pour se décharger de la culpabilité qui pesait sur elle depuis si longtemps. A tort. Grâce à Pippo, leur camarade un peu étrange. Aïda, c’est elle la jeune fille en colère sur un banc de pierre…

Au final, une tragédie familiale dans laquelle l’auteure explore les passions humaines dans un écosystème qui a sa préférence, celui d’une île. Un huis clos sous le soleil méditerranéen. Entre jalousie, culpabilité, vengeance, ruse, renoncement, envie…

Véronique Ovaldé ausculte au plus près les relations intrafamiliales au fil du temps. Et s’autorise, au fil des pages, un pas de côté. Une mise à distance moqueuse pour aussi se dire que tout cela nous parle.

Un régal de lecture. Vraiment.

Extraits

 Page 89 :« Aïda reste seule, elle est au milieu du désert, celui où soufflent des rafales malodorantes et où ricochent les ossements de ceux qu’on a enterrés à la va-vite. Tout ce qui se passe ici lui paraît étrange et familier. Mais plus facile à supporter qu’elle ne l’imaginait. Elle se souvient qu’en frappant, il y a quinze ans, chez la logeuse du 22 via Brunaccini à Palerme, elle avait eu l’impression de demander l’asile politique. C’est quelque chose à ne surtout pas perdre de vue. Elle a tout à coup peur d’être prise dans une sorte de sommeil amnésique. « 

Pages 162-163 :« Violetta, à l’époque, appelait Leonardo dès qu’elle le pouvait (malgré l’absence de téléphone dans la maison-du-bas – Aïda voyait d’ici sa soeur aînée, coincée dans la cabine téléphonique devant la mairie : plastique chaud, impatience et sueur aigre), et elle s’inquiétait de sentir son amoureux distant, elle disait qu’elle allait venir le chercher à Palerme, Retourne auprès de Violetta, disait Aïda après avoir couché avec Leonardo, moi je ne refoutrai plus jamais les pieds dans cette putain de famille, mais toit, tu n’as rien à faire ici, nous n’aspirons pas aux mêmes choses Leonardo, et il ne pouvait s’empêcher de la trouver légèrement condescendante alors qu’au fond c’était juste qu’elle se sentait prise entre l’arbre et l’écorce. Et c’est de nouveau le cas quinze ans après, de retour sur l’île. » 

Page 236 :« Plus que tout peut-être, ce fut la déception de ne plus jamais sentir sa main dans celle du Père qui la désempara. C’est un détail, certes, en comparaison de la dureté dont il fit preuve à son égard. Mais Aïda aurait tout donné, vingt ans de sa vie par exemple, ses yeux ou la vie de ses deux autres soeurs, pour revenir quelques jours plus tôt, rembobiner et reprendre les choses où elles auraient pu être reprises sans danger. Mais elle pouvait bien promettre tout ce qu’elle voulait, il ne fut remarqué aucun saut temporel à Iazza. Le monde continua son cours indifférent. »

Fille en colère sur un banc en pierre, Véronique Ovaldé, Flammarion, 21€

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