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FAST FOOD

 

 

Voilà une chouette découverte ! Ce roman, je l’ai choisi pour son titre, ce que raconte sa quatrième de couv (forcément !) et la collection à laquelle il appartient. Cette fois encore, la collection Qui vive de Buchet Chastel est un vivier d’histoires modernes, alertes et qui nous parlent. La preuve encore avec ce « Fast-food » de Grégoire Damon.

L’auteur, trentenaire, vit à Lyon. Il a publié un premier roman, « La rue de la soif » en 2007 et plusieurs recueils de poésie.  Il a un blog  Et est à l’origine d’une revue de poésie.

L’histoire ? C’est celle d’un fast-food et de ceux qui y travaillent. Des hommes et des femmes venus d’horizons divers, arrivés là pour payer leurs factures, un boulot étudiant, parce qu’il y avait de la lumière…

Derrière les comptoirs du Meecoy, les équipiers ont construit une micro-société. Il y a des départs, des arrivées, des disparitions et une révolution en marche… ou pas. Et cette hiérarchie pesante, omniprésente, débilitante qui arrive un beau matin avec un nouveau management à décliner fissa. Face au grand capital, les équipiers de Meecoy vont se mobiliser.

 

Les rapports de force se déclinent autour du toaster ou de la machine à frites.  Et parmi les équipiers, la solidarité s’organise quand les ennuis arrivent par escadrille.

Greg est là depuis plus de trois ans. L’étudiant brillant n’est finalement pas allé plus loin que le menu grandes frites. Là, il fomente, observe, alerte et ne perd pas une miette de cette micro-société contemporaine. Greg manie les mots, se pique de poésie pour impressionner les filles et notamment Tig, qu’il voit chaque jeudi pour tenter de refaire le monde.

La direction a de l’ambition pour lui. Elle est bien la seule… Jusqu’à l’idée du Grand soir !

Autour de Greg, il y a Christ le bad boy, Jack le parano, Ed la grande gueule, Croquette le clown et Graf, le petit con tatoué. Mais aussi Suma, Semen, Jérémie, Ange, Francky, Peggy, Jipé, Nounours, etc.

C’est drôle, cynique, cruel. A consommer sans modération !

Extraits

 Page 25 :« Jusqu’ici, tout avait été simple. Il y avait quelques dizaines de règles écrites et non écrites à garder à l’esprit, moyennant quoi on pouvait suer sept heures par jour, implorer la pointeuse, et espérer s’en sortir vivant. Il y avait deux sortes de gestes : les gestes autorisés ( ceux qui rapportaient du pognon à l’entreprise) et les gestes interdits ( tous les autres). 

Chaque geste autorisé était explicité sur des fiches cartonnées fixées un peu partout : l’utilisation et l’entretien des machines. Les temps et les températures de cuisson des trois toasters et des trois grils. Les procédures de nettoyage. Le nombre de gestes à faire pour garnir tel sandwich. Et dans quel ordre. Le nombre d’équipiers à mettre sur chaque machine, selon l’affluence. »

Pages 150-151 :« Soudain, ce n’était plus un rêve, c’était un plan. 

Il faudrait débarquer un soir de match. Ou à la fin des soldes, à la troisième démarque. Arriver à quinze ou vingt, juste après le rush, au moment où les nerfs se relâchent. En tenue réglementaire, le visage caché sous des masques de cochons hilares. Marcher droit sur les bureaux, le local managers, le local hôtesses, profiter de l’effet de surprise, plaquer au sol, tirer à bout portant, en pleine tête. Je savais que je choisirais la sauce tartare, l’une de celles qui puent le bus, et surtout celle dont le pistolet a le plus gros débit. J’irai directement sur Semen. Et BANG ! à la sauce tartare se belle chevelure noire, et BOUM ! taches irrécupérables, sa chemise désespérément blanc enculé. »

 Page 230 : « Maintenant, ça fait deux jours que je tape. Je n’ai rien inventé : c’est parti d’une boutade d’Ed, d’une crise d’angoisse de Jack et d’un bout de poème inachevé, d’une jonglerie de plateaux de Croquette et d’un paquet de cigarettes jeté un jour sur ma table. Et maintenant j’ai mon poème. C’est peut-être du plagiat mais c’est le plagiat de cent vies, dont la mienne. Merde à l’honnêteté intellectuelle. De toute façon, je ne vivrai pas assez longtemps pour rembourser la dette que j’ai contractée auprès de ces gars. »

« Fast-food », Grégoire Damon, Buchet Chastel, 16€.

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