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Rentrée littéraire

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Toujours un défi. Publier un deuxième roman quand le premier a été un véritable succès de librairie, ce n’est pas simple. Casse-gueule, même. Olivier Bourdeaut s’y est risqué. Après le fabuleux succès de « En attendant Bojangles », dont je vous avais parlé ici, il revient avec « Pactum salis », toujours édité chez Finitude.

Après les multiples traductions à travers quelque quarante pays et plus de 500.000 exemplaires vendus en France, une adaptation au théâtre ( sur scène en janvier) et un tournage pour le cinéma en cours, l’auteur a changé de registre. Radicalement. Ici, pas d’histoire autour d’un amour fou, mais une rencontre improbable entre deux hommes que tout oppose.

Il y a Michel, agent immobilier à son compte. L’homme a réussi professionnellement et affiche un train de vie cossu. Mais aussi une solitude qui poisse ses mocassins.  Jean, lui, a fui Paris et son ami Henri pour devenir paludier à Guérande. Une vie monacale, mais un choix assumé. Loin de la société des hommes et d’un amour déçu, il travaille durement.

Deux métiers que l’auteur, installé désormais en Espagne, a pratiqué. Avec plus ou moins de succès, avoue-t-il.

 

Une nuit de beuverie, Michel échoue sur un tas de sel, urine sur le travail de Jean. Quand ce dernier le découvre, il manque de le tuer. Ils finiront par apprendre à se connaître, à se découvrir le temps d’une semaine.  Entre leurs nuits de débauche, les deux hommes travaillent ensemble. Jean embauche Michel. Malgré la fascination réciproque qu’ils exercent l’un sur l’autre, les différences sont très nombreuses, profondes. Et le drame jamais loin.

Michel est-il si détestable ? Jean si adorable ? Pas si sûr…

« Pactum salis » qui donne son titre au roman est un proverbe médiéval qui signifie « L’amitié est un pacte de sel », c’est-à-dire durable, éternelle. Allez savoir…

Un livre corrosif sur les différences sociales et la solitude.  Avec une fin étonnante que j’ai dû relire pour comprendre. Pas sûre d’y être parvenue ;-)

Extraits

Page 21  : « Il ne s’était jamais senti l’âme d’un leader, d’un chef de meute, et encore moins d’une assistante sociale et lorsque deux ans de succès chez Century 21 la firme lui proposa, à vingt ans tout juste, de prendre la direction d’une nouvelle agence, il déclina poliment. Son travail acharné, autistique disaient certains, avait porté ses fruits au-delà de toute espérance. ll réalisait une vente par semaine, parfois plus, et se trouvait parmi les meilleurs de l’hexagone, le plus jeune assurément. Mais après deux ans, le regard qu’il portait sur sa société avait négativement évolué, et il ne se voyait pas mener une escouade de requins d’eau douce tapissés de jaune pâle. Son ambition ne devait pas se préoccuper de la réussite des autres, encore moins de la faire prospérer, alors il préféra se mettre à son compte. Il payait donc une comptable au forfait, et son téléphone aussi. »

Page 59  : « Il était assez grand désormais pour affronter le silence et la solitude Il n’avait plus besoin de boire pour se donner du courage et affronter sa tâche. Mais l’ivresse était une compagne à laquelle il pensait souvent. Il lui arrivait de lui rendre visite sur un coup de tête, une contrariété. Il suffisait parfois d’un vent tiède, d’un coucher de soleil orange, d’un air entraînant débordant d’une terrasse de café, d’une envie de compagnie, de brouhaha. Une envie de parler tout simplement. » 

Page 133  : « […] Hormis les commerçants, quelques touristes et les pêcheurs rencontrés lors de ses ivresses hivernales, il n’avait pas parlé plus d’une heure à quelqu’un depuis presqu’un an. Il y avait bien sa banquière, qu’il voyait trente minutes par trimestre, mais le sujet abordé était toujours le même. Il ne pensait pas avoir de réserve suffisante pour alimenter une conversation qui allait s’étendre tout au long d’un plateau de fruits de mer, peut-être même d’un dessert. Il regrettait de ne pas avoir proposé une crêperie comme dédommagement des singeries estivales de ce Michel. Au moins, une galette complète, une crêpe au sucre, une bolée de cidre pouvaient se bâcler en une demi-heure, mais un plateau de fruits de mer avec ses tourteaux à décortiquer, ses bigorneaux à extraire, ça pouvait durer une éternité, au bas mot. »

« Pactum salis », Olivier Bourdeaut, Finitude, 18,50€

 

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