Flux pour
Articles
Commentaires

C_La-singuliere-tristesse-du-gateau-au-citron_7939

 

Une histoire pas banale. Voilà ce que propose Aimee Bender avec « La singulière tristesse du gâteau au citron ». Auteure américaine, Aimee Bender est aujourd’hui un des auteurs les plus originaux du paysage littéraire outre-Atlantique. Son roman présenté ici a d’ailleurs connu un grand succès aux Etats-Unis.

Aimée Bender enseigne le creative writing à l’ University of Southern California. Elle s’occupe également d’un atelier de théâtre pour malades mentaux. Elle est l’auteure de deux recueils de nouvelles, disponibles également aux Editions de l’Olivier (« La fille en jupe inflammable », « Des créatures obstinées ») ainsi que d’un roman intitulé « L’ombre de moi-même ».

L'auteure, Aimee Bender. (Photo Babelio.com)

L’auteure, Aimee Bender.
(Photo Babelio.com)

 

L’histoire de ce roman ? C’est celle de Rose Edelstein, 9 ans. Une petite fille qui découvre, alors qu’elle mord dans un morceau de son gâteau d’anniversaire, qu’elle ressent alors l’émotion éprouvée par sa mère au moment où elle assemblait les ingrédients. Une révélation qui va plonger l’enfant dans de drôles de réflexions. Et lui donnera le pouvoir de savoir, rien qu’en les goûtant, d’où viennent les ingrédients ingérés et quelles émotions traversent ceux qui les cuisinent.

Sa famille, qu’elle croyait unie, lui apparaît sous un nouveau jour grâce à ce pouvoir. Entre une mère dépressive et trompant son mari, un père débordé et pas très attentif et un frère tellement absent qu’il en a développé également un don assez déstabilisant – il finira d’ailleurs par disparaître totalement – sans oublier une grand-mère qui expédie à la famille des colis d’objets cassés.

Un sixième sens qui, au quotidien, pose souci à la fillette qui trouve du réconfort auprès de George, le meilleur ami de son frère.

Au fil des pages, on suit donc le parcours de Rose, de l’âge d’enfant à celui de jeune adulte. Entre fable et science-fiction, dans la banlieue de Los Angeles.

 Extraits

Page 21 : « La qualité des ingrédients – le bon chocolat, les citrons bien frais – semblait cacher quelque chose de plus important et de plus sombre, et cet arrière-goût commençait à remonter à la surface. Je sentais sans difficulté le chocolat, mais par glissements legers; comme un effet secondaire qui se déroulait, se déployait, j’avais le sentiment que ma bouche se remplissait aussi d’un goût de petitesse, d’une sensation de rapetissement, de contrariété, d’une distance dont je devinais qu’ils étaient liés à ma mère, le goût de sa pensée fourmillante, une spirale, quasiment comme si j’étais capable de sentir le grincement de sa mâchoire ayant provoqué cette migraine qui l’avait poussée à prendre autant d’aspirine que nécessaire, alignées en points blancs sur la table de nuit, une sorte d’ellipse à son commentaire : je vais juste m’allonger un petit moment… »

Page 83 : « Au bout d’une semaine, j’étais capable de démêler un peu plus vite les impressions qui m’assaillaient. Les pépites étaient industrielles, donc elles avaient ce goût légèrement métallique et absent, le beurre avait été fait à partir d’un lait peu riche parce que les vaches venaient d’une exploitation où elles vivaient entassées. Les oeufs dégageaient un soupçon de grande distance et de plastique. Tous ces élements vrombissaient en arrière-fond, et plus près, il y avait le pâtissier qui avait mélangé les ingrédients et préparé la pâte et qui était en colère. Une colère rentrée dans le cookie lui-même. »

Page 130 :« Je ne sais comment le décrire si ce n’est en disant que mon père était un homme plutôt déterminé, intelligent et foncièrement simple qui s’était retrouvé à vivre avec trois personnes terriblement compliquées : une femme que la solitude blessait à vif, un fils dont le regard était si déstabilisant que les gens mettaient des boîtes de céréales entre lui et eux pour avoir un semblant de répit, et une fille qui ne pouvait avaler son déjeuner sans marcher ensuite un quart d’heure pour s’en remettre. Qui étaient ces gens ? J’avais de la peine pour papa, surtout quand nous regardions ensemble des séries à la télé et que je voyais à quel point il aspirait à l’existence simple des gens dans les spots publicitaires, lui qui l’avait un jour connue, contrairement à nous autres. »

Mon avis

Chaque bouchée de ce livre donne envie de prendre une autre, puis une autre… jusqu’à la dernière phrase. Aussi surprenant que cela puisse paraître, ce roman vous rend gourmand d’en savoir plus. Dommage peut-être qu’il s’étire sur tant d’années pour s’achever sur une fin, à mon goût, un peu bancale.

« La singulière tristesse du gâteau au citron », Aimee Bender, Editions de l’Olivier, 22,50€. Traduit par Céline Leroy.

Laisser un commentaire

*