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Je n’avais jamais lu livre de Charles Juliet. C’est désormais chose faite avec  » Lambeaux ». Joli et très sensible récit de 154 pages d’un parcours de vie. Pas simple. L’auteur a voulu y parler de ses deux mères :  » L’esseulée et la vaillante, l’étouffée et la valeureuse, la jetée-dans-la-fosse et la toute-donnée » et retracer un parcours de vie peu commun. A la deuxième personne du singulier, l’auteur raconte une vie, la sienne, à travers le portrait de sa mère et celui de la femme qui l’a finalement élevé.

La première, c’est l’aînée d’une famille de quatre filles. On ne parle pas beaucoup. On travaille. On mange. On dort. Cette grande et belle fille a pourtant des capacités pour apprendre, mais son père l’oblige à rester à la ferme. Pour aiser sa mère et élever ses soeurs. La jeune femme s’exécute en rêvant d’autre chose… Un chagrin d’amour plus tard et la voilà mariée à Antoine. Suivront quatre enfants et une dépression si grave qu’elle lui coûtera la vie alors que la Deuxième Guerre mondiale fait fureur. Jean, le petit dernier de la fratrie, sera placé. Le début d’une nouvelle vie. A la mort de sa mère biologique, il apprend la vérité. Et va se battre. Essayer de vivre avec cette culpabilité qui l’étreint : celle d’avoir causé la mort de sa mère, épuisée déjà par ses grossesses précédentes.

Au fil des années et des expériences, c’est l’écriture qui sauvera l’auteur du livre, redevenu Charles. Il l’écrit page 150 : « Ni l’une ni l’autre de tes deux mères n’a eu accès à la parole. Du moins à cette parole qui permet de se dire, se délivrer, se faire exister dans les mots. Parce que ces mêmes mots se refusaient à toi et que tu ne savais pas t’exprimer, tu as dû longuement lutter pour conquérir le langage. Et si tu as mené ce combat avec une telle obstination, il te plaît de penser que ce fut autant pour elles que pour toi.  »

Au final, Charles Juliet, auteur d’une trentaine d’ouvrages, livre là sa vie dans ce qu’elle a de plus précieux et de plus douloureux. Un récit fort, vrai. Une (très) jolie rencontre.

« Lambeaux », de Charles Juliet, Folio.

 

 

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