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Autant vous le dire tout de suite, ce livre, – un premier roman – est totalement barré  et un brin tordu ! La novelliste américaine Jen Beagin a changé de format. Elle vit à Hudson, dans l’État de New York, a collaboré à plusieurs revues et publié des nouvelles. «  On dirait que je suis morte » a reçu un accueil enthousiaste outre-Atlantique et a été finaliste de plusieurs prix.

9782283031797

 

 

L’histoire ? Mona a vingt-quatre ans, une vie cabossée, une âme pure et une intuition désastreuse lorsqu’il s’agit de se construire une vie meilleure. Le jour, Mona fait des ménages pour gagner sa vie, vidant au passage les tiroirs d’anxiolytiques de ses riches clients.

Le soir, celle qui surnomme Dieu Bob, distribue des seringues aux junkies de Lowell, Massachusetts. C’est là qu’elle tombe amoureuse de M. Dégoûtant, un artiste raté et sans dents. Une histoire courte, intense… et dont l’issue va sérieusement perturber la jeune femme au parcours déjà chaotique qui n’en avait vraiment pas besoin…

C’est le début d’une odyssée trash et burlesque qui la mènera jusqu’au Nouveau-Mexique.

Là-bas, au milieu de loufoques en tout genre, elle s’évertuera, à force de cuvettes à récurer, de drogues plus ou moins douces et d’introspections un brin erratiques, à trouver sa place dans le monde entre une médium collectionneuse de poupées, un père détraqué, des voisins végans et un cancéreux possiblement pervers…

Bref, ce roman est détonant, sucré, trash, foutraque… et revigorant  car affranchi des règles ! Les scènes, les mots sont crus. Et racontent la vie d’une d’une tranche de l’Amérique d’aujourd’hui.

 

 

 

 

Extraits

Pages 67-68 : « Elle ne pouvait pas croire qu’il se soit vraiment tué. Il aimait trop ses problèmes. Elle avait toujours affirmé que, si les gens étaient obligés de mettre leurs ennuis au rebut, ils retourneraient tous à la décharge dès le lendemain, prêts à patauger dans une mer d’ordures pour les retrouver. Il avait sans doute quitté l’hôtel, trouvé un endroit à lui comme ils avaient toujours parlé de le faire, mais sans elle. Peut-être qu’il s’était casé avec une de ses putes. Un junkie dans son genre. Quelqu’un qui l’acceptait tel quel, ou une connerie approchante. Plus probable encore, il vivait toujours au Hawthorne, puisqu’il n’avait pas les moyens de se payer un vrai logement, et lui avait envoyé ce paquet en guise d’adieux. Pour pouvoir tourner la page. 

Page 185 :«  […] Elle se hérissa en entendant le mot “attention”. Elle se souvenait du jeu, mais ne l’avait jamais envisagé en ces termes. Elle l’appelait “ On dirait que je suis morte ” et y avait toujours joué dans son intérêt à lui plutôt que dans le sien, comme si cela donnait à Mickey une chance de montrer le meilleur de lui-même. Il n’acceptait d’y jouer que quand il y avait un public. Elle flottait, il plongeait, nageait bruyamment vers elle et la tirait par le bras vers l’échelle. Parfois il la soulevait dans ses bras et la portait jusqu’à la pelouse. Elle trouvait qu’ils étaient tous les deux exceptionnels dans leurs rôles – lui feignant l’affolement, elle jouant la morte. »

Page 238 :« Betty est loin de se douter que Mona se réjouissait d’une mort prématurée. L’idée d’avaler son acte de naissance un peu plus tôt lui servait de doudou depuis de nombreuses années, une idée-doudou qu’elle caressait au milieu de la nuit quand elle n’arrivait pas à dormir. Si Betty lui avait dit que sa ligne de vie s’achevait à quatre-vingt-dix-huit, quatre-vingt-huit ou soixante-dix-huit ans, elle aurait paniqué. Certes, vingt-sept c’était un peu jeune pour mourir. C’était peut-être pour ça qu’elle avait les mains qui tremblaient. En même temps, beaucoup de gens incroyables sont morts à cet âge-là. Non pas qu’il y ait lieu de s’inquiéter, puisque Betty était une arnaqueuse de première. « 

 « On dirait que je suis morte », Jen Beagin, Buchet Chastel, 20€.

 

 

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