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Rentrée littéraire

Poursuivons notre promenade à travers les romans de cette rentrée. Cette nouvelle étape nous mène tour près dans l’univers de Jean-Philippe Toussaint, auteur chéri sur ce blog. Et pour cause. Jean-Philippe Toussaint, écrivain et cinéaste belge, sait, depuis plus de dix ans, nous tenir en haleine avec une histoire d’amour simple… et très compliquée. Celle de Marie et du narrateur.

Photo : Madeleine Santadréa

Photo : Madeleine Santadréa

 

Jean-Philippe Toussaint a publié son premier roman en 1986, « La Salle de bain ». D’autres suivront.

En 2002, il publie « Faire l’amour », premier opus dans lequel le lecteur fait la connaissance de Marie et du narrateur, et de leurs amours compliquées.

Il y aura ensuite  « Fuir » en 2005, couronné d’ailleurs par le prix Médicis et « La vérité sur Marie » en 2009, distingué par le prix Décembre. Avec « Nue », l’auteur clôt son ensemble romanesque.

NUE

Clap de fin sur l’histoire de Marie Madeleine Marguerite de Montalte ? C’est en tout cas ce que nous indique la quatrième de couverture de « Nue ». Quatre romans, quatre saisons, quatre états… Et quatre Marie, mais toujours insaisissable.

Marie, créatrice de mode en vogue, parcourt le monde au gré des collections et de son inspiration. Le narrateur( dont on sait toujours aussi peu de choses) la suit, la retrouve, la quitte, la rejoint depuis quatre romans. Sans pourtant jamais vraiment parvenir à la comprendre complètement. Marie est son tourment, son obsession et le tourbillon indispensable à sa vie.

 

Cette fois, la créatrice s’est lancée dans un projet fou ( il va mal tourner), une robe de miel portée par un mannequin à Tokyo. Les deux personnages, qui se sont quittés dans le précédent opus, viennent de passer leurs vacances ensemble sur l’ile d’Elbe puis de se rejoindre leur appartement respectif.

Et après ? C’est à ce moment là qu’on retrouve le narrateur. Il attend un coup de fil de Marie. Celui qui lui dira de venir la rejoindre pour toujours. Il attendra deux mois. La mort du gardien de la maison de son père (décédé dans l’opus précédent) pousse Marie à appeler son amour pour lui demander de l’accompagner aux obsèques. Là-bas, un incendie dans une chocolaterie, un intrus dans la maison de son père perturbent les retrouvailles mais les accélèrent aussi. Et Marie n’a-t-elle pas autre chose à lui annoncer ?

 

 Extraits

Pages 31-32 :« Là-bas, à chaque heure, j’avais été au contact de Marie, nous nous voyions constamment, nous prenions nos repas en tête à tête sur la terrasse, je frôlais ses bras nus dans les couloirs de la maison et j’effleurais sa taille en descendant les sentiers qui menaient à la mer quand nous allions nous baigner. Même si je n’ignorais pas que nous étions séparés, je ne souffrais pas le moins du monde de cette séparation puisque nous étions tout le temps ensemble. C’était même ainsi, et uniquement ainsi, que je concevais maintenant la séparation avec Marie, en sa présence. »

Pages 102-103 : « Nous regardions les derniers préparatifs de l’embarquement, les barrières métalliques que des employés déplaçaient pour laisser les véhicules monter à bord, quand Marie me prit doucement la main sous la pluie. Elle ne m’avait pas regardé, elle avait simplement soulevé la main à côté d’elle et avait pris la mienne avec naturel, et ce geste si tendre qui m’emplit d’apaisement, ce geste si inattendu, me parut aussi surprenant que si les deux navires qui nous avions sous les yeux, abandonnant un instant la froideur impassible avec laquelle ils cohabitaient dans le port, s’étaient soudain rapprochés dans un geste de tendresse. Je sentis la main de Marie humide contre ma paume, et je savourai aussitôt physiquement, comme à titre exclusivement privé, la pertinence de cette loi physique universelle qui veut que deux corps qui entrent en contact ont tendance à égaliser leur température. »

Page 146 : « Il y avait toujours eu, chez Marie, une qualité d’émotion incomparable, qui ne tenait pas tant aux circonstances réelles qui provoquaient ses réactions affectives qu’à cette disposition océanique que j’avais repérée en elle, qui acérait sa sensibilité, l’exacerbait et faisait vibrer ses sentiments avec une intensité hors du commun. »

Mon avis

Je ne suis absolument pas objective dès qu’il s’agit de Jean-Philippe Toussaint ! Ce type-là est un génie de l’écriture et de la narration. D’ailleurs ce blog avait évoqué son essai « L’urgence et la patience » dans lequel il expliquait comment il précédait pour créer cette alchimie littéraire. Fin de l’histoire donc ! Marie et le narrateur vont-ils enfin parvenir à être heureux ? Allez savoir. Une chose est sûre, Jean-Philippe Toussaint sait parler d’amour. Le compliqué, celui qui fait mal et qui ne guérit jamais vraiment…

« Nue », de Jean-Philippe Toussaint, Editions de Minuit, 14,50€.

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