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Prix Roblès 2012

Prix Roblès 2012

C’est donc sans surprise que le prix Roblès 2012 a été attribué à François Garde pour son premier roman  » Ce qu’il advint de l’homme blanc ».

 

C’est parti ! Après la présentation, vendredi 16 mars de la sélection pour le Prix Roblès 2012, les comités de lecture n’ont plus qu’à se plonger dans les six romans de jeunes auteurs pendant les dix semaines à venir. Après une sélection 2011 qui s’était avérée décevante, les lecteurs ont rendez-vous avec des univers singuliers, et des premiers romans assurément prometteurs…

« Rester sage » d’Arnaud Dudek

De mon côté, j’ai commencé ma deuxième participation au prix Roblès, avec mes camarades du journal, par le premier roman d’Arnaud Dudek, « Rester sage« .

Arnaud Dudek

 

Un livre pas commun. A plus d’un titre. L’histoire ? C’est celle de Martin Leroy. Un trentenaire qui a cru, enfant, que s’il restait sage, sa vie serait réussie. Grossière erreur. L’homme perd la fille qu’il aimait, son boulot, ses illusions et veut s’en prendre à son ex-patron qui a vendu son agence de voyage à un roi de la pharmacie.

Mais rien ne va se passer comme il le pensait ! Et Martin tombe sur son ami d’enfance, dont le prénom n’est d’ailleurs jamais cité. Ce dernier, cadre en disgrâce dans une ONG, ne va pas si bien que ça non plus. Les deux anciens camarades plongent dans leurs souvenirs en treize courts chapitres qui mélangent présent et souvenirs des années d’enfance et d’adolescence. Tandis que des personnages secondaires ( l’ancien patron de Martin, la mère, etc.) sont aussi au coeur de l’intrigue.

Le rythme de ce premier roman est haletant, vif. Piqué d’images un peu surprenantes, de digressions un peu capillotractées mais c’est frais. Et prometteur.

Page 31 : « Sa mère s’appelle Cathy. Elle vend des chaussures dans un magasin du centre-ville. Elle maîtrise l’art d’aligner des phrases calibrées, je ne les ai plus en trente-huit, il y a un chausse-pied sous votre chaise, ces escarpins affinent vos jambes, nous recevrons d’autres modèles la semaine prochaine. Elle déteste ça, mais il faut bien nourrir Martin. Les chaussures lui ont également permis de quitter la maison de poupée de ses parents, de prendre un deux-pièces, de s’assumer un peu« .

Page 50 : « […] Débarquer avec brutalité chez les responsable  de son licenciement, s’expliquer, parler de plus en plus fort, donner un coupe de poing dans le mur, le menacer de lourdes représailles s’il ne saisit pas son téléphone pour demander à la nouvelle équipe dirigeante de le reprendre, partir sur une victoire, voire une augmentation de vingt pour cent. L’audace des timides« .

A la fin du livre, l’auteur livre un autoportrait en une page et demi.  » Moi je consens à vieillir mais j’essaie de lutter. A ma manière. L’émerveillement est ma bouffée d’oxygène. Vieillir oui, mais en laissant fondre des bonbons sous ma langue ». Tout un programme…

« Rester sage », d’Arnaud Dudek, Alma éditeur, 13,80€.

 

« Avant le silence des forêts », de Lilyane Beauquel

Pour mon deuxième livre de la sélection du prix Roblès, je me suis plongée dans les tranchées de la guerre 14-18 avec le premier roman de Lilyane Beauquel, « Avant le silence des forêts« .

Lilyane Beauquel est agrégée de lettres, enseignante, chargée de mission Culture à l’université de Lorraine. Elle vit et travaille dans la région de Nancy. « Avant le silence des forêts » est son premier roman.

L’histoire ? Elle est tragique. Pendant un an, en 1915 en Lorraine, nous suivons la vie dans les tranchées de quatre amis Bavarois, que sont Otto, Simon, Heinrich et Nathan. C’est Simon qui écrit et décrit le quotidien dans ses carnets. Tout y passe. La faim, le froid, le manque, la guerre (les attaques, les combats, les gaz), la colère, la folie… et la mort. Là, à deux pas des tranchées tenues par les Français, des jeunes types de leur âge avec les mêmes rêves.

Ils ont vingt ans, ils avaient des rêves de leur âge, des envies… tout s’est englué dans la boue d’une tranchée.  Restent les souvenirs, les rêves de retour. Anke, la fiancée de Simon attend leur premier enfant. Le verra-t-il un jour ? Rien n’est moins sûr…

Au fil des 295 pages, une écriture dense, et très poétique pour décrire pourtant ce que la guerre aura fait de pire ou presque. Les phrases sont souvent longues, pleines de descriptions d’une nature toujours identique et pourtant toujours différente à cause du temps qui passe, des saisons qui s’évanouissent. Les textes de Simon sont denses mais souvent courts.

 Page 18 : « Car cela nous fascine : l’armée nous domestique, nous repérons les règles du jeu, Otto, Heinrich, Nathan et moi Simon, accrochés à l’idée qu’être ensemble allait nous dispenser de tous les heurs et malheurs. C’est de cela que nos pas sont faits, de cette naïve résistance, et les soldats qu’on va nous opposer n’ont pas d’autre consistance« .

Page 54 : « Les vagues idées de bonheur gisent dans le vent qui les emporte pour des générations plus chanceuses, mais le vent hésite tant notre passage sur terre lui importe encore, quelques secondes« .

Page 65 : « Et je rêve de cavaler sur le dos d’un cheval, pour arriver à temps près du nourrisson si rose que j’en rirais. Et Anke me laisserait les aimer tous les deux, sans trouver à redire à ce que je rimaille rien que pour eux, et gagne ma vie et la leur dans un métier sans peur et sans honte. Mais voilà, je suis plus triste que les choeurs de morts, au plus profond des criques que personne ne visitera. Nous sommes là pour longtemps, sans savoir pourquoi nous l’avons mérité. »

Page 219 : « Il nous est bien doux ce soir de composer le plat des petits bonheurs, ils sont accommodés de gestes d’amitié. Nous n’aimerions que ronger des os à moelle, dans le pot-au-feu des maisons, au lieu d’entendre les cris de celui qui n’a pas vingt ans et se fait amputer« .

« Avant le silence des forêts », de Lilyane Beauquel, Gallimard, 19,50€.

 

« Allée 7, rangée 38″ de Sophie Schulze

Je viens de terminer le troisième livre de la sélection !  Et, à mon humble avis, le meilleur des trois pour l’instant. Un livre court, – 93 pages ! – qui vous emmène en voyage en Allemagne, en France à travers le XXe siècle. A travers l’histoire de Walter, celle de sa mère mais aussi les grandes figures allemandes de la philosophie et de la pensée.

Un étonnant premier roman que ce « Allée 7, rangée 38 » écrit par Sophie Schulze. Cette ancienne élève de Philippe Lacoue-Labarthe et Jean-Luc Nancy à Strasbourg, auteure d’une étude sur Nathalie Sarraute parue dans la revue de l’université de Moscou, a vécu en Arabie saoudite, au Niger et en Russie ; elle vit aujourd’hui à Paris.

 

Outre le prix Roblès 2012, ce roman a fait partie de la sélection du Goncourt du Premier roman ainsi que de celle du prix Wepler.

 

L’histoire ? C’est donc celle de Walter. Et de sa mère, Franziska. Celle-ci vit en Allemagne du nord. Avant la Deuxième Guerre mondiale. Walter, un enfant mal-aimé, va fuir. Se retrouver en France. Deviendra légionnaire, puis mineur. Il sera naturalisé Français mais devra rejoindre son pays d’origine.  Avant de pouvoir revenir en France. Il se mariera, aura trois enfants, devra faire interner sa femme française,  Alice … Une vie comme des milliers d’autres. Et pourtant. L’auteure a fait le choix de plonger cette vie qui défile dans son siècle malmené et de nous raconter, en parallèle, celle de plusieurs  philosophes allemands. Une mise en perspective qui nous rappelle que nous sommes tous faits d’eau, de sang, de sentiments… et de choix.

A la vie de Walter se mêlent ainsi celles de Nietzsche, Heidegger ou encore Hannah Arendt. Etrange combinaison qui fonctionne cependant à merveille.

Le ton est vif, rythmé. Enjoué ou tragique. Sans fioriture d’adjectifs, de digressions ou de descriptions interminables. Des phrases courts qui racontent la vie d’un homme à qui on a fait peu de cadeaux. Et celle d’une époque. Entre la montée du nazisme, de l’antisémitisme puis la guerre.

Page 15 : «  A Oldenbourg, quinze ans après la mort de Marx, Franziska n’a jamais entendu parler de lui. Pas plus que de Nietzsche ou de Husserl. Franziska est une fille simple, la fille aînée du tavernier. Elle sait à peine lire et écrire. Elle a d’autres soucis. Le temps approche où elle devra se marier. Son père songe à Günther, le fils d’un riche fermier. C’est un beau parti. Mais Franziska préfère Karl, un pêcheur du coin. »

 Page 27 : « A Strasbourg, Walter respire. Ce pays étranger, dont il ne comprend pas la langue, ignore son passé. Il s’enivre à l’idée qu’une vie sans père, sans meurtre, sans patrie, est possible. Il est libre. Innocent. ressuscité. Il voudrait garder éternellement cette ivresse du soulagement et de la rédemption. Elle le suit pendant qu’il arpente Strasbourg du pas rêveur d’un jeune amoureux. Ses poches sont vides. Mais il a l’envie de cette nouvelle vie. »

Pages 46-47 : « 1933. Hannah quitte l’Allemagne. Elle a été arrêtée par la Gestapo, et il s’en est fallu de peu que cette arrestation ne tourne à la catastrophe. Elle y voit un avertissement. Comme Walter, elle décide de ne pas rester dans ce pays qui ne veut plus d’elle. Comme Walter, elle décide de partir pour la France. […] Heidegger, lui, reste en Allemagne. Il s’y enracine même. Sa fidélité est payée de retour. Il est nommé recteur de l’université de Fribourg, le dernier échelon de la gloire universitaire.« 

 Allée 7, rangée 38, de Sophie Schulze, Editions Léo Scheer, 15 euros.

 

 « Va et dis-le aux chiens » d’Isabelle Coudrier

Enfin ! Je viens de terminer le quatrième livre de la sélection du prix Roblès 2012. Celui qui compte 814 pages… L’une de mes collègues, membres du comité du lecture m’avait fait part de sa difficulté à « entrer » dans ce livre. C’est donc avec un peu d’appréhension que je l’ai ouvert. Pour ne plus en sortir avant le mot FIN, écrit à la 814e page… comme au cinéma. Car c’est bien de cela que nous parle ce long roman, de cinéma, création, d’amour et de la difficulté à vivre avec ou sans. Et pour cause. Isabelle Coudrier est scénariste et réalisatrice pour le cinéma nous apprend la quatrième de couverture. Elle aime aussi écrire. Et son premier roman  » Va et dis-le aux chiens » réunit ainsi ses deux passions.

Drôle de livre que ce roman ! Assez rapidement, il devient addictif. Et voilà le lecteur, en tout cas moi, happé par le récit rétrospectif et introspectif des deux personnages principaux que sont Sylvia Delaunais et Louis Schlessinger.

La première est professeur de mathématiques. Depuis scénariste avant de préparer une thèse et de reprendre l’enseignement à la faculté.

Le second, a abandonné Polytechnique pour vivre de sa passion du cinéma et devenir, assez vite, rédacteur en chef du mensuel de référence La Revue.

Ces deux-là se rencontrent. Voudraient s’aimer mais ne savent comment faire. Trop commun pour l’un, trop compliqué pour l’autre. Alors ? Pendant des années, ils vont se chercher, se fuir, se quitter, se marier… et se retrouver. Mais à quel prix !

Un livre riche, qui se perd peut-être parfois, mais qui donne la part belle aux personnages, qu’ils soient principaux ou secondaires. La famille de Louis offre des portraits sans concession ( Philippe son père, Odile, sa mère bientôt disparue, Julie sa soeur si fragile…). Celle de Sylvia aussi mais c’est surtout le milieu du cinéma que son personnage nous permet de toucher du doigt. Entre réalisateur en panne d’inspiration, acteur raté et producteur frileux. Ses séances de travail avec Paul Blass sont d’une grande cruauté !

Finalement, un joli ( mais long !) moment de lecture. Et un style plus que prometteur.

 Page 124 : « Parmi les hypothèses que multipliait Sylvia pour justifier les élucubrations de son amie, une l’ennuyait néanmoins un peu plus que les autres. Cette hypothèse était que Françoise, connaissant la solitude de Sylvia, cherchait à l’adoucir en lui suggérant qu’elle ne perdait pas grand-chose à n’avoir aucune vie amoureuse. Si tel était le cas, Françoise se trompait, car Sylvia ne souffrait pas de sa solitude. Peut-être même y tenait-elle. […] La différence entre Sylvia et Françoise était simplement que les actes de Sylvia étaient plus en accord avec ses convictions que ne l’étaient les actes de Françoise avec les siennes. »

 Page 282 : « Sylvia ne connaissait guère les plaisirs du corps, exception faite de la dégustation de pâtisseries. Elle en avait toujours nié les lourdeurs et les servitudes. Elle le lavait et le nourrissait, mais ne tolarait guère qu’il se manifestât autrement que selon les souhaits de son esprit. Jusque dans ses maladies, elle avait toujours cherché à le contrôler. Après la lecture de La montagne magique, vers sa douzième année, elle avait ardemment désiré contracter la tuberculose, mais son corps n’avait rien voulu savoir et le corps médical pas davantage. »

Page 622-623 : « J’ai l’impression que Sylvia va s’engouffrer dans la brèche de mes confidences stupides et va y mettre tout le pathos dont elle est capable. Pour faire diversion, je demande du pain à la serveuse. Je constate que Sylvia et moi, nous parlons rarement de tout et de rien. Nous dérivons toujours, quoi qu’il arrive, vers le centre, le noyau dur des choses et de la vie. A force de manquer de légèreté, elle en est fatigante. Mais il est possible que j’en manque un peu moi-même. Je l’observe, par morceaux, la main droite, puis une épaule, l’avant-bras nu, très fin. La naissance du cou. Je la découpe tranquillement du regard. Je remonte vers l’oreille, elle porte des boucles, et ses cheveux sont châtains, avec des reflets blonds, elle ressemble vraiment à une femme. Allons nous écraser contre le mur ensemble je t’aime peut-être mais je ne le dirai pas. C’est trop facile ».

 

« Va et dis-le aux chiens », d’Isabelle Coudrier, Fayard, 25€.

 

« Ce qu’il advint du sauvage blanc », de François Garde

La date de proclamation du prix Roblès avance à grand pas. Il est temps pour moi de finir de lire la sélection. Après  » Va et dis-le aux chiens« , je me suis donc plongée dans les aventures extraordinaires, au sens littéral du mot, de Narcisse Pelletier. Avec « Ce qu’il advint du sauvage blanc« , François Garde signe un premier roman qui nous emmène loin. A l’autre bout du monde, mais pas seulement.

Son roman nous oblige aussi à lire autrement ce que l’Européen bon teint a longtemps tenu pour acquis : le sauvage doit être éduqué, instruit sous peine de vivre dans le malheur et le pêché. Et quand c’est un Blanc qui se retrouve abandonné chez les sauvages ? Toute l’intrigue de ce roman est là.  » Ce qu’il advint du sauvage blanc »  n’est pas une robinsonnade, mais une quête et une interrogation sur la place de l’homme et ce que nous faisons des différences. Et un livre qui se lit très facilement.

François Garde, qui en décembre dernier, recevait le prix Goncourt du Premier roman, a été administrateur supérieur des Terres australes et antarctiques françaises avant de se convertir à l’écriture.

Né en 1959, François Garde préside aujourd’hui le tribunal administratif de Dijon. Son livre est également sélectionné pour le prix du Livre Inter 2012.

L’histoire ? Elle est tirée de faits réels. Même si l’auteur les déplacés dans le temps. Narcisse Pelletier, alors âgé de 14 ans a bien été abandonné sur une île. Puis récupéré par des Anglais et ramené en France, il a fini sa vie en travaillant dans un phare.

Narcisse Pelletier

 Dans le roman, nous sommes en 1844, sur une plage australienne. La goélette Saint-Paul fait route vers Java et la Chine. Plusieurs malades à bord oblige l’embarcation a fait escale, là.

Narcisse Pelletier, alors âgé de 18 ans, et matelot de son état, ne reprendre pas la mer. Oublié, abandonné à son triste sort. Et livré ainsi à des sauvages, des Aborigènes, avec qui il va vivre dix-sept ans avant qu’un navire anglais ne le ramène à la civilisation. Et aux questions. Le jeune homme a tout oublié de sa vie d’avant. Jusqu’à sa langue maternelle. Il lui faut tout réapprendre.

Un homme, à peine plus âgé que lui, qui se décrit comme « voyageur« ,  féru de géographie et des nouvelles sciences humaines, va se voir confier une mission : recueillir le « Sauvage blanc » et remonter le fil de son histoire extraordinaire. Une mission qui occupera Octave de Vallombrun toute sa vie. Au fil des lettres qu’il adresse au président de la Société de géographie, il raconte ses difficultés et ses avancées.

Mais pour quel résultat ? « Parler, c’est comme mourir« , lance Narcisse Pelletier. Alors…

Pages 12-13 : « Imaginer la scène, les dialogues, les ordres qui se succédaient le rasséréna. Le capitaine avait eu raison et fait un choix un marin. Ce n’était pas un abandon délibéré, une trahison qui le visait personnellement, mais la conséquence d’une situation périlleuse. En s’écartant du groupe, il avait désobéi aux ordres et cette faute mériterait une punition. »

Page 105 : « Narcisse ne parvient pas à écrire, ni à penser le futur, ni à raconter son séjour. Je croyais au début que son esprit n’était qu’une page blanche sur laquelle mes leçons allaient se graver, un une cire molle sur laquelle j’imprimerai ma marque. Je constate que sur certains points il s’y refuse et que je n’arrive à rien. L’image d’un Narcisse progressant vers notre monde, sortant de la caverne de Platon et marchant vers le soleil du XIXe siècle est erronée. Il y a deux personnages en lui : un matelot enfermé au cachot depuis des années et qui lutte pour en sortir ; et un diablotin sauvage qui bataille pied à pied pour l’en empêcher. Le matelot l’emporte, mais pas toujours et pas sans concessions ».

Page 233 :  » Ainsi, le sauvage vivant au milieu de Blancs adopte nos usages, alors que le Blanc précipité parmi eux conserve les bienfaits de la civilisation, des années durant – à la seule exception connue et pour cela fascinante de Narcisse. Peut-on mieux démontrer la supériorité du Blanc sur le sauvage ? La force d’attraction ainsi mise en valeur, et qui s’exerce toujours dans le même sens, confirme ce que le bon sens suggère. A l’exception de Narcisse. »

« Ce qu’il advint du sauvage blanc », de François Garde, Gallimard, 21,50€.

 « Le vestibule des causes perdues », de Manon Moreau

Et de six, ou presque. Je me suis plongée dans le dernier livre de la sélection du prix Roblès 2012 dont nous connaitrons le nom ce vendredi et j’avoue que je ne l’ai pas lu jusqu’à la fin.  Le premier roman de Manon Moreau, « Le vestibule des causes perdues » m’est tombé des mains. Littéralement.

L’histoire, le style, le forme du roman n’ont pas trouvé grâce à mes yeux. Seule rencontre ratée de cette sélection plutôt enlevée.

L’histoire ? C’est donc celle de Mara, de Robert, de Bruce, de Clotilde et les autres. Des hommes et des femmes qui un jour, pour une raison qui leur appartient, décide de mettre le cap à l’Ouest, vers Saint-Jacques-de Compostelle. Manon Moreau en a fait un roman qui ne révolutionne pas le genre.

Je n’ai pas dépassé la page 118. Tant pis pour moi. A vous de voir. Et de lire.

 » Le vestibule des causes perdues », de Manon Moreau, Editions Delphine Montalant, 22€.

Prix Roblès 2011

 

Hélène Grémillon pour « Le confident »

Début juin, le prix Roblès 2011 était attribué à Hélène Grémillon pour  » Le confident ».

Avec plusieurs collègues, j’ai participé à l’un des comités de lecture. Objectif ? Lire les six livres de la sélection, – assez moyenne pour le coup ! – et débattre entre nous avant de voter… et d’attendre le résultat des autres comités pour connaître le lauréat.

Expérience plutôt sympatoche car pas sûr que ces livres m’auraient attirée d’emblée. Intéressant aussi de pouvoir débattre avec d’autres lecteurs avertis des qualités de tel ou tel ouvrage. A moins de faire front contre tant de médiocrité… Bref, de quoi se lancer prendre au jeu et recommencer dès l’année prochaine !

Si ça vous dit, voici les six sélectionnés en question :

- «  Les vies extraordinaires d’Eugène », d’Isabelle Monnin ( J.C. Lattès)

Un père raconte comme dans un journal intime que son fils Eugène, grand prématuré, est mort d’un staphylocoqie doré, six jours seulement après sa naissance. Ce père veut raconter sa vie ou ses vies, trouve ceux qui auraient dû être avec Eugène à la crèche, rencontre l’infirmière qui a passé du temps avec son fils, etc . Sa femme, elle, ne veut et ne peut plus parler depuis la mort du bébé. Sa façon a elle de faire son deuil.

Impressions : bien écrit, drôle, sensible. Point de vue du père, assez original car en général plutôt celui de la mère ( Marie Darrieusecq, Camille Laurens, etc.)

 

- «  Le fils », de Michel Rostain ( Oh ! Editions)

Octobre 2003 : Lion, 21 ans, étudiant en philo à Rennes, meurt d’une méningite fulgurante ( purpura fulminans) alors qu’il se trouve chez ses parents, à Douarnenez. Son père est metteur en scène au théâtre de Quimper, sa mère est comédienne. Lion a une copine, des envies, des amis et une vie pleine de questions. Lion raconte comment son père vit son deuil à travers flash-backs, souvenirs et récit du quotidien ( pompes funèbres, incinération, cimetière, dispersion des cendres sur un volcan en Islande) une fois la mort survenue.

Impressions : Un récit pour arriver à la conclusion «  on peut vivre avec ça ». Livre sensible et drôle. Original par la façon dont le sujet est traité. Images de la Bretagne. La fin avec tous les signes interprétés est moins bien réussie. On suit le deuil du père jusqu’à qu’on en soit libéré, avec lui.

«  Cent seize Chinois et quelques », de Thomas Heams-Ogus ( Fiction & Cie, Seuil)

L’histoire, très mal connue, des Chinois installés en Italie pendant la Deuxième Guerre mondiale et qui, comme les Tsiganes ou les Juifs ont été déportés ou plutôt internés non loin du Gran Sasso. Entre 1941 et 1943, la vie s’organise entre cérémonie de conversion au catholicisme, mauvais traitements et isolement. A côté des paysans, ces Chinois vivent, transparents. Puis c’est la débâcle. Certains fuient. Rejoignent des Tsiganes et le groupe de Bosco Martese. Prêts à se battre dans une guerre qui les a privés de liberté.

Impressions : Pas un seul dialogue. Langue précieuse. Voire trop. Cependant éclairage inédit sur 2e GM. Intéressant, un peu onirique aussi. Pas banal.

« La secrète mélancolie des marionnettes », de Denis Grozdanovitch (Editions de l’Olivier )

Denis, jeune écrivain et ancien champion de tennis se rend dans une résidence d’écrivain en Italie à Florence pour plusieurs semaines. L’occasion de rencontres, de longues discussions, permettant à l’auteur de combler l’inaccompli de la vie. Amour, mort, philosophie, tout y passe.

Impressions :un régal de lecture ! La langue est riche et rigoureuse. Le propos loin des préoccupations terre-à-terre. On se laisse prendre à ce livre. A cette histoire d’amour et aux multiples histoires d’amitié. La preuve que les rencontres apportent toujours quelque chose pour peu qu’on se laisse aller à écouter l’autre.

-  « A l’attention de la femme de ménage » , d’Emilie Desvaux ( Editions Stock)

Une jeune femme, enfant unique, s’adresse à sa femme de ménage qui, chaque jeudi, nettoie la maison familiale, la Propriété. On y découvre la vie d’une enfant, d’une adolescente entre ses parents. Transparente. Sans relief. Et surtout cette omniprésence de la solitude. Relation incestueuse avec le père en filigrane. Puis sa vie d’adulte, de femme mariée avec André puis de veuve. Et cette relation homosexuelle entamée avec la nièce de son mari, la jeune Marie-Jeanne. La jeune femme reste, s’accroche. Elle en mourra. La solitude aura gagné. Et la Propriété retrouvera son calme.

Impressions : comme un polar. On sait bien que quelqu’un est mort. Va mourir. La jeune fille ou la propriétaire de la maison ? Facile à lire. Pas de surprise. Mais le désarroi et la culpabilité d’une femme qui n’a pas choisi sa vie. Pas mal.

3 Réponses à “Prix Roblès 2012”

  1. « Rester sage » de Dudek n’est pas mal fichu… pour une nouvelle ! Il en a toutes les caractéristiques, y compris l’absence d’épaisseur, au sens propre comme au sens figuré. Bref comme on dit sur C+, ça n’enlève rien à ses mérites, mais comment le comparer aux romans ?

  2. Maryline dit :

    Au « Comité du Bout du Monde », au Chili, nous avons envoyé notre vote 2012 ce soir. C’est notre 3ème année consécutive et celle que nous avons préféré :-)
    Bonne réunion cette semaine et à bientôt !

    • vanina dit :

      Bonjour le Comité du Bout du Monde !
      Eh oui, plus que quelques jours pour voter pour le prix Roblès 2012.
      Je trouve aussi, et je ne suis pas la seule, que la sélection était vraiment bonne.
      Qui aura le prix ? Réponse vendredi. Vous pourrez suivre, jusqu’au Chili, l’annonce du lauréat sur le site de La Nouvelle République.
      Bien cordialement.

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