Flux pour
Articles
Commentaires

COCCINELLES  Rentrée littéraire

Tous les goûts sont dans la nature ! C’est pareil en littérature. C’est donc par curiosité que j’ai ouvert « Des coccinelles dans des noyaux de cerise ». A cause du titre. Plutôt cocasse. A cause du parcours de son auteur aussi, Nan Aurousseau.

Et enfin pour la maison d’édition Buchet Chastel dont je loue régulièrement les choix éditoriaux.

Peut-être ne le savez-vous pas, mais Nan Aurousseau a fait de la prison. Condamné pour braquage alors qu’il avait 18 ans, il a passé six années derrière les barreaux.

De quoi en tirer assez de matière pour écrire des romans parmi lesquels « Bleu de chauffe ». La preuve encore avec celui-ci.

Au fil des pages en effet, le portrait d’un meurtrier hors du commun. Pas vraiment un tendre…

A Fresnes, François a partagé la cellule d’un caïd du grand banditisme, Medhi. Ce dernier, marié à la belle Karima, ignore le quinquagénaire qu’il considère visiblement comme du menu fretin.

Ce qu’il ne sait pas, c’est que François ourdit un plan machiavélique qu’il mettra en musique dès sa sortie de prison. Il y aura du sang, des larmes… et un pactole à la clé.

En attendant le grand soir, François, meurtrier multirécidiviste, vit dans une caravane avec Micheline, qui visiblement est bête et moche, tout en entretenant une relation avec Muriel, fille du troisième codétenu à Fresnes, « le Vieux ».

Ajoutez à cela une langue pleine d’argot, un brin de vulgarité  (quelques scènes très crues, quand même !) et un tableau de la France miséreuse d’aujourd’hui et vous obtenez un roman noir, rythmé et plein de suspense.

 

Extraits

 Page 9 :« Un loup dans la jungle, voilà ce que je suis. Un inadapté, un solitaire avec la rage au ventre parce qu’on m’a toujours méprisé. Une gueule un peu en biais, c’est vrai, une carcasse d’oiseau de proie qu’a rien croûté depuis six mois, et alors ? Je suis né dans la mort pour résumer. Parce que je suis un survivant. Les toubibs ont maintenu ma mère en vie pour que je naisse. Ils l’ont maintenue six mois. Elle avait ramassé un barillet de 357 magnum dans la tête par un retraité qu’elle cambriolait alors qu’elle était enceinte de trois mois. Ca faisait la quatrième fois qu’elle le cambriolait. Il en a eu marre et il l’a attendue avec le 357, caché dans l’ombre de sa chambre, à côté de l’armoire. »

Page 109 : « Elle attendait peut-être que je la questionne, que je lui parle. J’avais autre chose à penser qu’à ces conneries-là, ses tapinages au bois de Vincennes quand elle avait vingt ans, son premier amour, son premier coup de couteau, son premier viol dans une cave, sa première tournante. C’était du lourd qui nous attendait et elle n’en savait rien. On entendait la pluie qui tombait dru sur le toit de la caravane, et elle qui chouinait, qui sanglotait. Fallait que je tienne malgré tout ça, malgré toute cette misère dans laquelle on s’était enfoncés tous les deux comme des noyés, des asphyxiés de la société. »

Page 196 : « Il y a tellement de clichés à propos des assassins. A me voir avec mes vieilles lunettes rafistolées au sparadrap on ne me prend pas au sérieux. Les gens ont des idées complètement sclérosées sur l’allure d’un tueur. Ils vont trop au cinéma et voilà le résultat, quand vous leur tombez dessus ils mettent un certain temps à croire que c’est pour de vrai, en attendant, ils espèrent. L’espoir, il n’y a rien de pire pour la victime. Moi, je sais jouer sur cette fibre-là. « 

« Des coccinelles dans des noyaux de cerise », Nan Aurousseau, Buchet-Chastel, 15€.

Laisser un commentaire

*