Flux pour
Articles
Commentaires

Rentrée littéraire

la-sainte-famille,M364193 Prêts à découvrir les p’tits trésors de la rentrée littéraire ? Pour cette première étape, je vous emmène dans l’univers de Florence Seyvos que j’avais découvert grâce à son précédent roman « Le garçon incassable », dont vous trouverez la présentation ici.

Elle revient avec « La sainte famille ». L’histoire ? Celle de Suzanne, de son frère Thomas et de la plongée qu’elle effectue dans ses souvenirs, ses sensations d’autrefois. Tout remonte, le divorce de ses parents (qui séparera aussi Suzanne de son frère cadet), les vacances passées dans la maison de famille, entre Jeanne, arrière grand-mère mourante, une grand-mère pas toujours facile (Marthe) et Odette, sa soeur,  si effacée, à la vie si étriquée… S’y ajoutent l’oncle libidineux et la cousine délurée, Mathilde.

Suzanne raconte ce qu’elle voit de ses parents qui ne s’aiment plus, de sa vie qui change. De ses rêves et ses aspirations foulées aux pieds. Au fil des pages, la pelote, faite de fils d’intimité, se déroule. Et quand Suzanne n’est pas à même de raconter, c’est Thomas qui, subtilement, prend le relais.

On voit les images, cette fois encore. Normal quand on sait que Florence Seyvos, qui avait obtenu le prix Goncourt du premier roman pour « Les apparitions », est également scénariste. Elle a ainsi écrit plusieurs films avec Noémie Lvovsky dont « Camille redouble ».

Encore un très joli roman. Sensible.

 Extraits

Pages 18-19 :« Odette affiche un calme contrôlé, qui donne de la raideur à ses gestes et ses intonations. Elle est perpétuellement inquiète. Elle a peur qu’un enfant se blesse, que quelqu’un se prenne le pied dans le tapis de l’escalier, qu’il y ait un orage, que Suzanne n’ait pas fait pipi avant d’aller se coucher, que Thomas s’étouffe avec une prune, que le four explose quand on l’allume, que les enfants aient la diarrhée, que les enfants soient constipés, que l’infirmière qui donne les soins à Jeanne ait un accident de voiture à cause de la pluie, que Marthe soit contrariée. La possible contrariété de Marthe pèse constamment sur le coeur et l’estomac d’Odette. C’est pour cela, aussi, qu’elle reste avec les enfants. »

Page 82 :« Suzanne se souvient d’une période où il y avait de la gaieté dans la maison il était difficile de savoir si ses parents se trouvaient soudain heureux ensemble ou si leur joie à chacun venait d’ailleurs, mais ils étaient légers en présence l’un de l’autre. C’était particulièrement perceptible pendant les trajets en voiture. Pour Suzanne, les trajets en voiture étaient la vie même, la vie à échelle réduite, mais infiniment précise et déployée. Le passé derrière, l’inconnu devant. A l’intérieur de la voiture sa famille, dehors le monde. Quatre personnes ensemble et pourtant parfaitement indépendantes, chacune dans son silence. Les trajets en voiture étaient aussi les seuls moments où elle parvenait  à aimer en même temps ses deux parents et son frère. Les aimer avec force, comme on aime une idée. Et aussi les aimer physiquement, à travers ce qu’elle voyait ou devinait d’eux. La main de son père sur le levier de vitesse. Les cheveux de sa mère qui débordaient de l’appuie-tête ».

Page 116 : « Entre Suzanne et sa mère, la séparation a tout changé. Il n’y a plus de mère autoritaire et plus de fille rétive. Elles s’écrivent plusieurs fois par semaine des lettres de deux ou trois pages, dans lesquelles elles se racontent leurs journées. Sa mère parle de Thomas, de nouveaux amis qu’elle a rencontrés, elle mentionne de temps à autre son nouveau compagnon, juste pour ne pas que Suzanne oublie qu’il existe. Suzanne fait le portrait de ses camarades de classe, de ses professeurs. Elles essaient l’une et l’autre d’écrire des lettres les plus vivantes et les plus drôles possible. Quand Suzanne décachette une lettre de sa mère, ses yeux filent aux dernières lignes pour parcourir des mots d’une douceur qu’elle n’aurait pas pu imaginer dans sa bouche l’année précédente. « 

« La sainte famille », Florence Seyvos, Editions de l’Olivier, 17,50€.

Laisser un commentaire

*