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Un nouveau cycle romanesque. Aki Shimazaki aime le procédé. Après deux pentalogies déjà à son actif, elle inaugure avec son nouveau roman « Azami », une nouvelle série.

Plus de trente ans que cette auteure qui a vécu les 26 premières années de sa vie dans son pays, au Japon, s’est installée au Canada et plus précisément au Québec, à Montréal.

Là-bas, elle écrit en français des romans qui, tout en finesse et sobriété mais sans faux semblant, parlent du Japon. « On ne dit pas les choses directement au Japon », dit Aki Shimazaki. Elle, a choisi un style simple et direct, minimaliste, pour ne rien cacher.

« Azami », ( ce qui signifie « chardon » en français) est donc le premier opus d’une nouvelle série, publiée chez Actes sud.  On y fait la connaissance de Mitsuo, un trentenaire, rédacteur dans une revue culturelle. Il est marié à Atsuko, avec qui il élève leurs deux enfants.  Une vie bien cadrée jusqu’au jour où il rencontre de manière fortuite un ancien camarade de classe, Gorô Kida, devenu président de la compagnie familiale, qui l’entraîne dans un club très sélect.

 

Là, il reconnait son premier amour de jeunesse, Mitsuko, devenue entraîneuse. Lui, qui n’entretient plus de relations sexuelles avec sa femme ( il s’agit d’un couple « sexless ») et compense en fréquentant des « Fûzoku-ten » (des établissements de services sexuels), en est totalement bouleversé.

Il retombe sous le charme de celle qu’il surnommait « Azami » dans son journal intime. Et devient son amant. Tandis que sa femme Atsuko mène à bien son projet d’exploitation légumière à la campagne, Mitsuo entame, en ville, une liaison adultère avec Mitsuko, mystérieuse mère d’un garçonnet de 4 ans, férue de littérature… et d’argent facile.

Dans les courts romans d’Aki Shimazaki, c’est le Japon et sa culture si particulière qui se raconte par la voix de Mitsuo. On y parle classes sociales, relations sexuelles tarifiées…

Outre les personnages, l’auteure s’attache également aux détails :  l’odeur d’une fleur, la forme des villes, le goût des aliments. Et le tout crée une alchimie littéraire rafraichissante.

Extraits

Page 41 :« Ma femme aime la campagne et la nature, comme la plupart des gens. Au contraire, je suis un citadin typique. Je ne me sens à l’aise si je reste longtemps à la maison de campagne. D’ailleurs, c’est ma femme qui en a hérité. Sa famille y passait ses vacances. Je n’arrive pas encore à m’y sentir chez moi.

Atsuko conduit habilement. De bonne humeur, elle fredonne une chanson. Une mélodie à trois temps légers. Malgré moi, je bats la mesure dans ma tête. La berceuse de ma grand-mère me revient encore : « Ce soi encore, ton oreiller est baigné de larmes. A qui rêves-tu ? Viens, viens vers moi… » Je jette un oeil vers ma femme qui balance sa tête au rythme de la mélodie. Distrait, je réfléchis : « Sera-t-il possible de recommencer à faire l’amour avec elle ? » »

Page 55 :« L’azami. Je trouve cette fleur unique, avec sa forme particulière et sa couleur violette. On n’en offre pas en cadeau à cause des épines pointues sur ses feuilles. Une fleur d’un abord difficile.

Je ne suis pas un coureur. Avant mon mariage, j’ai fréquenté plusieurs filles l’une après l’autre, mais je ne trompais personne. Et, lorsque j’ai décidé d’épouser Atsuko, je croyais naturellement lui rester fidèle. Bien que nous soyons devenus un couple sexless, je n’en cherche pas une autre.

Pourtant, je n’ai pas le coeur en paix depuis la réapparition de Mitsuko. Son image sensuelle revient constamment dans ma tête. J’attendrai son appel avec impatience. Mais, d’un autre côté, je sens qu’il vaudrait probablement mieux qu’elle ne le fasse pas. »

Pages 112-113 :« Je pense à Mitsuko. Cesser de la voir. Cette idée m’attriste profondément. Mais je n’aurai pas le choix.

Elle m’a ensorcelé dès que je l’ai aperçue au bar X., tout comme elle m’avait attiré il y a vingt-quatre ans. Nous sommes probablement unis par des pseudo-chimies qui ne lient que temporairement, comme elle le disait. Néanmoins, c’est la seule femme avec qui j’aie fait l’amour passionnément. Elle me manquera énormément. »

Mon avis

Les apparences sont souvent trompeuses. Et Aki Shimazaki prend un malin plaisir à jouer avec elles au fil de ce court roman qui fixe le décor de sa nouveau cycle romanesque. « Azami » fonctionne avec une économie de mots et de situations. Et les masques finissent pas tomber. Vivement le prochain opus !

« Azami », Aki Shimazaki, Actes Sud, 13,50€

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