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FABRIKANTNouvelle année, nouvelles envies de lectures. Pour le coup, je partage avec vous la dernière lecture de l’année 2013… Je ne suis pas à une contradiction près…

Alors voilà, j’ai découvert le premier roman de Yirmi Pinkus, un Israélien qui, auteur de comics , est aussi un caricaturiste et un illustrateur réputé. Avec « Le Grand Cabaret du professeur Fabrikant », il signe un premier roman qui plonge l’auteur dans la vie d’une troupe pas banale, créée à la fin du XIXe siècle, en Roumanie.

Quand le roman, commence, nous sommes à la fin des années 30, en Europe centrale. Markus Fabrikant, à qui l’on donne le titre ronflant de professeur, vient de mourir. Il est considéré comme l’un des pères fondateurs du théâtre roumain.

Quel avenir pour la troupe du Grand Cabaret constituée des décennies plus tôt dans le but d’éduquer les masses juives misérables à l’aide de « tableaux vivants » pour les initier à la grande histoire des hommes ?

 

Le professeur Fabrikant a, des années durant, pris sous son aile de jeunes orphelines, ou de jeunes filles promises à un bien médiocre avenir pour les faire jouer, chanter, danser… Une aventure qui a permis au Grand Cabaret de sillonner la Roumanie, la Pologne, la Bulgarie… des années durant.

A la mort de Markus, l’un de ses neveux, Herman, prend la suite. De nombreuses péripéties attendent les désormais vieilles dames du Grand Cabaret tandis qu’ici et là, l’antisémitisme grandit tous les jours. Le théâtre populaire yiddish vit ses dernières heures de gloire…

On suit avec plaisir les histoires des différents membres de la troupe tandis que Zofia, la belle-soeur du professeur Fabrikant ourdit des plans machiavéliques pour récupérer, entre autres, les diamants acquis par le fondateur de la troupe.

Mimi Landau veille sur les comptes, mais aussi sur les filles, devenues vieilles, mais dont la réputation a traversé tous les pays de l’Europe de l’Est. Il y a Perla, la petite Gina, la grande Gina, Esther, Yetti, la bonne Becky, Lydia, Kreindl…

Extraits

Page 37 : « Mimi tira une chaise et s’assit à côté de lui: “Je n’avais que huit ans quand votre oncle a décidé de me prendre dans son cabaret ambulant, et je lui en serai reconnaissante jusqu’à mon dernier jour, commença-t-elle en lui posant une main sur l’épaule. Que serais-je devenue sans lui ? A l’époque, les orphelins mouraient comme des mouches, soit de maladies, soit parce que personne ne s’occupait d’eux, et ceux qui avaient la chance de survivre ne pouvaient espérer qu’une vie raccourcie par un dur labeur. Je ne suis pas la seule à tout lui devoir, on est sept, sept orphelines – en fait huit, si on compte aussi Becky. Il nous a rassemblées il y a cela presque soixante ans. Nous ne sommes plus de prime jeunesse, monsieur Herman, et le Grand Cabaret est la seule chose que nous ayons. Pour votre oncle et pour nous, il faut vous lever et prendre la route avec nous. Vous pouvez compter sur toute l’équipe, Yingele, jeune homme, nous vous aiderons. Les filles connaissent leurs rôles par coeur, et moi, je gère les comptes quasiment les yeux fermés.” « 

Page 256 : « Elle n’avait jamais aimé les animaux domestiques, alors a fortiori celui qui appartenait à sa rivale honnie. En effet, dès son arrivée, Lydia Liphschitz s’était employée à ébranler le statut de la Duchesse par tous les moyens possibles et elle ne ratait jamais une occasion de lui chercher noise ou de l’énerver : les deux femmes ayant la langue aussi bien pendue l’une que l’autre, les dîners communs étaient devenus un véritable champ de bataille. En général, ces chicaneries se terminaient au détriment d’Esther qui, depuis la mort de sa chère Perla, ne s’amusait plus comme autrefois à faire de l’esprit et avait perdu beaucoup de son sens de la repartie ; d’ailleurs, si parfois elle arrivait à remettre Lydia à sa place, elle n’y prenait aucun plaisir, au contraire, elle s’en voulait de se laisser ainsi manipuler par son ennemie ».

Page 342 : « Bucarest, le 19 décembre 1938

Chère Giza,

Je t’écris ces lignes de la gare centrale de Bucarest. Le départ du train qui me conduira à Zurich est imminent et ceci marquera la fin de mon ancienne vie. Oui, Giza, chérie, figure-toi que j’ai quitté le Grand Cabaret du professeur Fabrikant. Dans trois heures prendra fin une période de soixante et un ans.De belles années ? Comment savoir, puisque je n’ai rien connu d’autre. Et puis, bons moments ou pas, c’était devenu un chariot que je ne pouvais plus tirer. J’espère que je vais réussir à t’expliquer comment tout cela est arrivé, et alors peut-être, tu comprendras que je n’avais pas le choix. »

Mon avis

En voilà un roman plein d’entrain et de rebondissements ! Suivre la vie d’un cabaret ambulant n’est décidément pas une sinécure ! On se plonge avec délectation dans le quotidien de cette troupe assez improbable et le fait que l’auteur soit également dessinateur n’y est pas pour rien. On retrouve d’ailleurs des illustrations au fil des pages. Un roman dont on voit les images pour finir et/ou commencer l’année ? Bonne pioche !

« Le Grand Cabaret du professeur Fabrikant », de Yirmi Pinkus, Grasset, 22€.

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