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Atiq Rahimi est né à Kaboul en 1962. Après avoir vécu la guerre d’Afghanistan de 1979 à 1984, ce fils d’intellectuels a obtenu l’asile politique en France. Si deux de ses ouvrages ont été écrits en persan, c’est directement en français qu’il a rédigé « Syngué sabour », – qui avait d’ailleurs remporté le prix Goncourt en 2008 ( un texte magnifique, soit dit en passant ! –,  et ce nouveau roman,  » Maudit soit Dostoïevski « , son cinquième livre.

Drôle de titre, non ? Drôle d’histoire aussi. Rassoul est un jeune homme de 27 ans. Il vit à Kaboul, pendant la guerre qui a suivi le départ des Soviétiques. Il a d’ailleurs étudié pendant trois ans en URSS, contraint par son père. C’est à ce moment-là qu’il découvre Dostoïevski et son  » Crime et châtiment ».

De retour au pays, Rassoul s’est éloigné de son père. Veille sur sa mère et sa soeur sans oublier sa fiancée Souphia, exploitée par une maquerelle, nana Alia… que Rassoul va tuer à la hache. Sans la voler.  Il en perd la voix. Et ses dernières illusions. Lui qui a voulu faire comme Raskolnikov, qui, dans  » Crime et châtiment », tuait une vieille usurière avant de se dénoncer et de devenir l’objet d’un châtiment librement consenti.  A Kaboul, alors qu’une guerre fratricide fait rage, Rassoul n’arrive pas à se faire entendre ( car il a perdu la voix, certes). La réalité est trop terrible pour que les autorités s’occupent d’un meurtre ( sans cadavre en plus !) qui ne préoccupe personne, même pas la fille de la victime qui croit sa mère partie en province !

Le jeune homme erre. Traîne son mal de vivre entre sa chambre d’infortune, la maison de Souphia et la sâqikhâna, où il fume du haschich. Et Rassoul insiste. Il veut être jugé.

Page 253, Atiq Rahimi écrit  :  » – Je vis mal mon crime, parce qu’il ne surprend personne. Et que personne ne le comprend. Je suis las. Las et perdu… »

Son cousin,  le chef de la sécurité, un vieux greffier, sa fiancée… tous essayant de comprendre Rassoul. En vain. Lui rêve d’absolu dans un pays en plein chaos.

Pages 264-265 :  » Vos plaies à vous sont des blessures infligées par les autres. Mais ma plaie, c’est moi-même qui me la suis faite. Au lieu de redoubler ma force, elle m’étouffe, elle ne me conduit nulle part. Parfois, je pense que j’ai voulu assassiner cette vieille uniquement pour savoir si j’étais capable de tuer, comme les autres… « 

Pas toujours simple de suivre Rassoul dans ses pensées. Moi, il a fini par me lasser. Heureusement, il reste la langue de Rahimi. Splendide.

 » Maudit soit Dostoïevski », d’Atiq Rahimi, chez P.O.L., 19,50€.

 

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